sorry that i let you down

Le soleil d’un été à Rome, la douceur de la vie italienne, les rires des enfants et le clapotis de l’eau des fontaines, ce ne sont des bribes qui lui reviennent parfois lorsqu’elle déambule dans les rues de la ville, dans les rues de sa ville, mais elle se souvient parfois. Le sourire éclatant d’une femme et les mains robustes d’un homme qui la soulevait comme si elle ne pesait rien, les après midis passés ensemble dans le parc ou les glaces dégustées dans le restaurant familial une fois le soir tombé : tous ces arrêts sur image qui défilent sous ses paupières closes lorsque finalement la nuit vient. Rosalina ne pense pas souvent à son enfance, néanmoins il y a toujours des questions qui reviennent plus fréquemment que les autres : où sont partis ses parents ? Pourquoi l’ont-ils laissée ? A l’époque, elle avait cherché à comprendre, demandant à sa grand mère paternelle qui l’avait recueillie. Mais jamais la vieille dame n’avait consentis à lui avouer la vérité.  « Si seulement tu avais bien voulu m’expliquer. » Susurre-t’elle face à la tombe de celle qui l’a élevée. Cela faisait des années qu’elle l’avait laissée elle aussi et malgré ses belles paroles et son air à ne pas y toucher Rose a très mal vécu le décès de la femme de sa vie. Mais elle n’est pas restée sans rien, seule héritière de la famille Moretti elle a repris la gérance du restaurant familial, faisant tourner d’une main de maitre l’établissement ouvert depuis des décennies. Cela n’avait rien de mirobolant, une auberge de quartier proche de la gare, pittoresque mais vivante et lieu de villégiature de tout un pan de la population romaine. Au fil des années, le restaurant est devenu une institution, un lieu de rassemblement pour tout type de créatures et surtout une formidable mine d’information pour la souriante et innocente serveuse. Si innocente que ça ? Rien n’est moins sûr car les apparences sont de mise dans la capitale italienne et il se pourrait bien que la douce biche n’ait pas de la rose que les pétales.

do you feel like a young god ?

Elle s’amuse Rose, Rome est son terrain de jeu et elle ne se rend pas compte qu’elle risque gros à fricoter avec l’obscur. « Tu sais que je pourrais faire disparaitre ce sourire de ton visage en moins d’une seconde ? » La menace sonne faux dans les oreilles de la blonde qui se contente de hausser doucement les épaules toujours cachée dans l’ombre d’une ruelle. « Je pourrais même faire disparaitre ton visage tout entier. » La voix siffle et un rire s’échappe malgré elle des lèvres de Bambi qui, fouillant un instant dans son sac en sort une enveloppe bien remplie mais cachetée avant de la porter au regard de son interlocuteur : « Ce que je sais surtout, c’est que tu as besoin de ça. » Indique-t’elle d’une voix douce en s’approchant lentement. Elle ne tremble pas, elle sait que la situation n’a aucune raison de dégénérer, alors elle s’amuse, grande enfant au milieu des bombes de la guerre. « Un peu de bienséance serait la bienvenue tu ne crois pas ? Je n’ai pas fait tous ces efforts pour te dénicher ce petit trésor pour me retrouver face à tes menaces. »  L’homme tique et elle voit son visage se crisper alors la jeune femme soupire légèrement et croise les bras sous sa poitrine comme une gamine à qui on aurait refusé des bonbons : . « Oh t’aurais-je vexé ? Excuse moi ce n’était pas dans mon intention. »  Une légère révérence faussement cérémonieuse vient ponctuer sa réplique tandis qu’elle scrute le visage du client d’un regard suspicieux : « Arrête de discuter Bambi on a pas toute la nuit. » Nouveau soupir et nouveau haussement d’épaules et elle tend l’enveloppe à son interlocuteur un air blasé sur ses traits de poupée : « T’es vraiment pas drôle. » Et finalement elle parvient à lui arracher un léger sourire. L’homme s’empare de l’enveloppe et dans un geste pressé il l’ouvre en dévoilant le contenu à sa vue. Il n’y a pas besoin d’être sorcière pour deviner qu’il est satisfait de ce qu’il y trouve. Il range rapidement le butin dans la poche intérieure de sa veste avant d’en sortir une autre enveloppe, pleine de billets. « Je te paye pour me le permettre. » Indiqua-t’il d’un ton impertinent en jetant un coup d’oeil à blonde qui s'était empressée de récupérer son dû. Mais il n’y a plus de jeu qui tienne, l’enfant a laissé place à la femme d’affaires qui compte avec sérieux le montant contenu dans l’enveloppe. Ce n’est au final que lorsqu’elle eut terminé qu’un sourire reprit place sur son visage : « Le compte y est. Toujours un plaisir de faire affaires avec toi. » Pas plus d’échanges de banalités, en quelques secondes l’un et l’autre avaient disparus dans la nuit.

we could live like legends

La nuit était tombée depuis quelques heures sur la ville de Rome et ce soir là, Rose avait délaissé la salle du restaurant pour profiter un peu du calme de sa maison. A peine rentrée elle avait remercié la baby-sitter, une personne de confiance qui était la seule à avoir accès à son domicile   en son absence. Pensant que son fils était couché elle avait pensé le trouver dans son lit, confortablement installé et en voyage dans les bras de Morphée, quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle trouva le lit vide. « Lucca ? » Elle sent sa voix trembler légèrement Rose et ce même si elle tente de garder contenance face à l’inquiétude dont elle est victime à chaque fois que son fils échappe à sa surveillance. « Lucca où es-tu mon chéri ? » Nouvel appel resté sans réponse et elle sent le sang taper dans ses tempes à un rythme effréné. Sortant de la chambre elle entreprend de parcourir la maison pièce par pièce, s’attendant au pire. « Lucca ! » S’exclame-t’elle en le découvrant la frimousse de l’enfant apparaitre derrière la rambarde de l’escalier. « Je jouais à cache-cache mamma… » Le petit garçon baisse la tête conscient d’avoir inquiété sa mère. Malgré son jeune âge il faisait preuve d’une maturité étonnante face  « Il myo angelo… Ce n’est rien ne t’inquiète pas. » Murmure-t’elle en prenant le bambin dans ses bras le serrant avec force mais beaucoup de douceur contre elle. « T’as eu peur mamma ? » S’inquiète le garçonnet en scrutant le visage de sa mère avec ses grands yeux interrogateurs. Ce n’est qu’à ce moment là que la jeune femme se rend compte que quelques larmes se sont répandues sur ses joues. D’un geste rapide elle les fait disparaitre du revers de la main avant de déposer un baiser tendre sur le haut du crâne de son fils. « J’aurais toujours peur pour toi Lucca, tu le sais. Mais ce n'est rien, au lit maintenant, il est tard. » Et si l’enfant ne pouvait pas comprendre les raisons de cette inquiétude maladive Rosalina savait bien que ses activités pourraient bien lui couter bien plus cher que quelques bleus. Ce n’était pas pour rien qu’elle préservait à tout prix son anonymat et celui de la prunelle de ses yeux : les rues n’étaient plus sures depuis des années.