Les paysages défilent, tu cours aussi vite que possible, tu fuis, tu en es certain, mais tu ne sais pas pourquoi. Cette course effrénée se poursuit durant de longue minute, tu te vois traverser un genre forêt, cherchant à éviter les arbres les un après les autres jusqu’à ce que quelque chose entrave ton pied, entraînant une chute brutale. La douleur au niveau de ton crâne est lancinante et tout devient noir, d’un sombre profond, épais, ne laissant filtrer vraiment aucune lumière, tu t’enfonces dans cet univers nocturne sans rien pouvoir y faire.

1998

C’est en règle général à ce moment là que tu te réveilles en sursaut, rempli de sueur, et toujours aussi perdu. Ces images te hante depuis des années déjà et tu n’as jamais réussi à les expliquer. Tu sais que cette scène, tu l’a réellement vécu, tu sais que le jour ou cela t’es arrivé tu t’es réveillé perdu dans les rue de Rome sans même savoir que tu étais parvenu à venir jusqu’ici, mais jamais tu n’as pu te souvenir de ce qui s’est passé avant cette fuite. En réalité, lorsque tu t’es réveillé, tu ne connaissais même pas ton nom, ni même ton âge, ni rien d’autre te concernant. Apeuré par cette situation, tu t’es montré craintif face à toutes les personnes qui pouvait s’approcher de toi, effrayé de ce qu’ils pourraient te faire, te demandant s’ils faisaient partie de ce qui t’avais fait fuir de la sorte ou pas. Une femme a pourtant fait en sorte de te mettre en confiance, jour après jour, elle restait prêt de toi, t’offrant à manger, te parlant malgré le fait que tu n’ouvrait jamais la bouche en contrepartie. Tous les jours, elle te posait cette même question, qui est-tu ? Quel est ton nom ? Le fait d’être incapable de lui répondre t’angoissait toujours un peu plus, et tu pouvais voir en son regard qu’elle comprenait ce que tu ressentait et que si elle te posait continuellement cette même question ce n’était pas dans ce but là, mais bel et bien pour te pousser à réfléchir à la question. Les semaines passaient et tu as finis par faire confiance à Liana, la suivant peu à peu afin de dormir dans un vrai lit, partageant sa vie sans qu’elle ne te demande jamais de quoi la remercier. Tu as su voir la bonté pur en cette femme, tout comme elle a su voir que tu étais inoffensif même si tu ne connaissais rien de ta propre vie. Il faut avouer qu’il a fallu attendre des mois avant que tu laisses le moindre son sortir d’entre tes lèvres, non pas que tu ne savais plus comment faire, mais seulement parce que tu étais incapable de trouver quoi dire. Comme si tu avais peur des mots qui allaient finir par s’échapper d’entre tes lèvres, alors tu te contentais de donner un coup de main dans cette maison qui n’était pas tienne, mais qui pourtant avait tout d’un chez toi. Suivant Liana plus ou moins partout, tu passais ton temps à lire, essayer de rattraper toute l’histoire du monde puisque tes souvenirs ne te permettait pas d’en avoir connaissance, lorsque la jeune femme était en train de travailler, toi, tu apprenais une nouvelle langue, de nouvelle religion, comme si le fait d’apprendre tout ce qui était possible pour ton cerveau d’assimiler allait t’aider à te souvenir de ta propre vie, en vain, mais au moins, tu as rempli ton esprit de multiple culture et idéaux, faisant de toi l’être le plus éclectique qui soit.

1999

Un jour, Alors que Liana était entrain de préparer à manger, tu as vu la lame du couteau qu’elle avait dans les main transpercer sa main dans un mouvement maladroit. Sans même réfléchir, d’un geste instinctif, tu t’es redressé précipitamment pour rejoindre la jeune femme, enroulant sa main des tiennes, laissant ta magie agir alors que tu ignorais posséder un tel don. Tu as soigné cette femme sans le moindre effort, juste parce que tu le voulais, et c’est sous le choc que vous êtes resté à vous regarder, vous fixer tous les deux, cherchant des réponses que ni toi ni elle n’avait. Le monde de la magie vous était inconnu à chacun de vous et pourtant, cela ne vous a pas paru si impossible que ça. Ce jour, des mots totalement éraillés de par le mutisme que tu arborais depuis des années se sont échappés de tes lèvres. Ca va aller ? Elle t’a fait signe que oui, mais ce qui t’a le plus étonné ce jour là, et ce que tu garderas à jamais en mémoire, c’est le sourire magnifique qu’elle t’a offert en cet instant précis. Elle venait de te découvre tel un monstre de foire capable de magie, et tout ce qui attirait son attention ici, était le fait qu’elle découvrait enfin le son de ta voix. Alors comme ça, tu sais parler ? Un rire surpris et soulagé s’était échappé de tes lèvres. Il semblerait oui…. Sans même t’en rendre compte, tes mains n’avaient cessé de lui tenir la sienne, et étrangement tu n’avais pas du tout envie de lâcher prise. Mais tu pouvais voir le regard curieux qu’elle posait sur toi, et remarquant que son regard ne quittait absolument pas les tiens, tu t’étais mis à froncer les sourcils, te demandant ce qui pouvait bien lui passer par la tête en cet instant. Et les yeux violets, c’est nouveau ? Tu ne sais évidemment pas de quoi elle parle, et cela s’affiche sur ton visage alors que tu entends son rire avant qu’elle te t’amène devant un miroir, t’obligeant à ouvrir en grand les yeux face à ton reflet, bouche bé. Tu as pu voir tes yeux redevenir bleu seconde après seconde, te laissant dans l’incompréhension la plus totale. Maintenant que je suis sûr que tu sais parler, est-ce que tu saurais m’expliquer qui tu es ? Me donner ton nom ? Me dire comment cette coupure profonde a disparu, comme par magie de ma main ? Comment tes yeux semblent passer du bleu au violet comme ça leur chante ? Ta tête fait un signe que non, tu n’as aucune réponse, te forçant à baisser la tête, n’osant pas la regarder, de peur qu’elle te regarde désormais différemment. Je ne me souviens de rien… Et ce n’est pas un mensonge, tu n’as aucun souvenir de ce qu’était ta vie avant qu’elle ne te trouve. Et nouvelle fois, Liana te surprend, posant ses mains sur tes joues pour te forcer à la regarder, posant ses lèvres sur les tiennes, entraînant les battement de ton coeur à s’emballer, comprenant alors que même sans vous parler, vous avez réussi à créer un lien entre vous bien plus fort que tu n’aurais pu le penser. Vous avez alors décidé qu’il fallait te choisir un prénom, et alors que tu as sorti un tas de prénom commun et basique, des prénoms qu’on entend partout, une phrase de la jeune femme a su faire la différence. Avec tous les bouquins que tu as avalé cette dernière année, tu vas me dire que c’est le peu d’imagination dont tu sais faire preuve ? Sa joie de vivre, et sa gaieté naturelle avait le don de te faire sourire à coup sûr, et ce mot “imagination” ne faisait que se répéter dans ton crâne, laissant alors entendre un simple Rayel ?, sourire en coin alors que tu pouvais lire une nouvelle fois l’interrogation dans son regard. Cela signifie “imagination” dans certaine langue arabe… Un éclat de rire s'était échappé de ses lèvres qu’elle avait de nouveau déposé sur les tiennes. Enchantée Rayel..

2000

Vous avez vécu cette vie à deux, tombant de plus en plus amoureux l’un de l’autre jour après jour et ce durant plus d’une année encore, tu avais même trouvé un poste à l'hôpital Regina Margherita, essayant d’utiliser ton don à bon escient mais surtout de manière le plus discret possible. Les tonnes de livres que tu as lu, et surtout les tonnes d’informations que tu as emmagasiné depuis ta perte de mémoire t’ont beaucoup aidé à te faire passer pour un vrai médecin, il faut dire que tu appris cette profession même si tu n’as aucun diplôme qui le prouve et tu t’en sors vraiment très bien, alliant connaissance scientifique et magie pour sauver les personnes qui passent sous tes mains. Mais tout ça a bien failli te coûter la vie, surtout lorsque le monde obscure a fini par être révélé à l’humanité. Ce jour là, tu as compris que tu devais te montrer encore plus discret qu’avant, ne voulant surtout pas que tous les êtres qui se trouvait dans ton entourage te voit différemment. A part Liana, personne ne sait que tu possèdes un don, et ton groupe d’ami, tu y tiens, cette nouvelle vie que tu a créé autour de toi, elle est tout ce qui compte. Tu es heureux ainsi et c’est aussi sans doute pour ça que tu n’as plus cherché à connaître ton passé. Tu es Rayel Leonneli, mari de Liana Leonneli, médecin dans un hôpital tout ce qui a de plus humain et tu es très bien ainsi, tu ne veux pas que les choses changent. C’est pourtant le cas, malgré toi, plus tu découvres ce nouvel univers qui s’offre à vous, plus tu comprends ce que tu es. Un sorcier, un enfant de démon, et cela t’effraie, cela laisse comprendre que tu as une part sombre en toi et tu refuses cela. Tu ne te fais pas connaître comme sorcier, tu poursuis ta vie d’humain autant que possible, aidé par ta femme qui te soutient bec et ongle sans même prendre le temps de réfléchir.

2017

Les années ont défilé à une vitesse folle, et si ton organisme de sorcier ne montre rien sur ta peau, tu peux voir les rides prendre place sur le beau visage de Liana, mais pas seulement. Cette épidémie, la Malattia della morte, fait son apparition et ne vous épargne pas, malheureusement. Liana est la première touchée, tu la vois dépérir jour après jour, tellement rapidement, et tu as beau essayer de la soigner, tout ce que tes pouvoirs parviennent à faire, c’est atténuer la douleur, mais en aucun cas la soigner complètement. Alors tous les jours, à chaque fois que tu voyais qu’elle souffrait le martyre, tu te précipitais pour l’aider à se sentir mieux, même alors que tu ressentais désormais la fièvre toi aussi, alors que tu sentais que cette maladie s’était emparé de toi. Aujourd’hui, tu regrettes d’avoir continué d’utiliser tes pouvoirs avec elle, parce qu’aujourd’hui, tu sais que tu es celui qui lui a finalement ôté la vie. Elle avait mal, elle souffrait plus que d’habitude encore, alors tu as attrapé sa main, pour aspirer la souffrance qui se prenait d’elle, mais tout ne s’est pas passé comme d’habitude. Alors que tu souhaitais encore une fois l’aider, tu as vu son visage se tordre d’autant plus de douleur lorsque tu as laissé ton pouvoir s’enclencher. Tu n’étais pas entrain de la soigner, cette foutu maladie avait des effets secondaires sur ton propre pouvoir, déclenchant un effet inverse à ta volonté, te faisant découvrir que si tu pouvais soigner les gens, tu pouvais aussi les tuer dans d’atroces souffrances. Et c’est ce que tu as fais, avec Liana, avec l’être que tu aimais plus que tout. Tu as intensifié cette maladie chez elle, tu as rendu sa souffrance encore pire, et alors qu’il suffisait de lâcher sa main pour mettre à terme à cette folie, tu étais bien incapable de gérer la situation, entraînant la mort à te voler le seul être qui avait réussi à te faire oublier qu’avant elle tu avait une vie, qu’avant elle, tu as surement fait des truc horrible, tellement horrible que ton esprit à décidé de les sortir totalement de ta mémoire.

Aujourd'hui

Toi tu as survécu à cette maladie, même si pourtant, tu n’y as mis aucune volonté, tu t’es laissé sombré sous l’effet des divers symptôme de cette épidémie, mais rien à faire, il faut croire que ce n’était pas ton heure. Relever la tête a été très difficile pour toi, il a fallut que tu t’imprègne du fait que tu n’étais pas réellement fautif quant à la mort de Liana, que ce n’était pas ce que tu voulais, loin de là, que c’est la maladie qui t’a fait agir ainsi, alors que depuis ce jour là tu refuses d’utiliser tes pouvoirs, par peur de faire de nouveau du mal à quelqu’un. Tu continues pourtant de travailler à l'hôpital, cherchant à honorer la mémoire Liana, te rappelant sa bonté jour après jour et essayant de faire naître l'espoir dans l’esprit de chaque malade que tu rencontres, et ce, même si le violet de tes yeux qui refuse de disparaître désormais te trahit face à tous ceux qui t’entoure, laissant comprendre que tu es et a toujours été un sorcier, même si à tes yeux, tu es bien plus humain que certain humain de naissance.