Caractère : Méthodique, à la mode, fataliste, taciturne, fiable, tenace, sage, sarcastique, déstabilisé par une drague appuyée, calme, peut devenir violent si on touche à ceux qu'il aime, protecteur, artiste, ...
Show me a garden that's bursting into life
1878 - 1899 : Madrid
Un frisson sur ta peau laiteuse de nouveau né... tu venais de te contenter de naître sous l'éclat de la lune scintillant dans l'aube s'étirant dans le ciel. Et puis tu avais crié, c'était ce qu'on attendait de toi, deuxième rejeton d'une fratrie qui serait un jour composée de quatre enfants, brièvement. T'étais juste né, sans décider de ta famille, de ta richesse, ou en l'occurrence, de la pauvreté des tiens. Tu n'as jamais été que le fils d'un ouvrier et d'une mère au foyer. Et le destin, tu en aurais été persuadé alors, n'aurait laissé aucune fée se pencher au-dessus de ton berceau. A la place, tu t'es contenté de grandir dans les rues de la capitale madrilène, à voler sur les stands une pomme à l'occasion. Gamin des rues qui suivait l'exemple de ses ainés, qui savait que la vie n'était pas faite pour être facile, et qu'elle ne le serait sans doute jamais. On a parfois l'image de ces films qui montre une vie parfaite, liant liberté et indolence, mais la vérité, tu la connais, tu l'as vécue, tout ceci n'avait rien d'un conte pour enfant, loin de là. Les fins de mois étaient difficiles, il arrivait souvent que vous n'ayez pas assez à manger, de devoir chasser un rat ou un volatile trop curieux. Alors un jour, ton père et ta mère vous a annoncé qu'il était temps de partir, de quitter tout ça, et d'avoir une vie meilleure en Amérique. C'était votre El Dorado à vous. Ca te laissait rêveur, songeur, et t'as embarqué sur le bateau avec le reste de ta famille.
We'll do it all
1899 - 1903 : New York
Mais New York... c'est Ellis Island tout d'abord. C'est survivre à une traversée en mer dans des conditions plus que douteuses, parmi des conditions d'hygiène merdiques, des maladies qui se diffusent sournoisement parmi les voyageurs, sans distinction, les rats qui rôdent la nuit et que l'on entend trotter à quelques centimètres de sa tête. Tu n'oublieras jamais ces jours et ces nuits interminables, et le temps passé sur le pont du bateau à tenter d'apercevoir la statue de la liberté. Vous en rêviez de ce monde meilleur, de cet avenir qui serait différent, de ce destin que vous pourriez vous créer en vous rendant là-bas. Ton père avait déjà un travail, ce fut la raison qui vous permis de débarquer, mais ce fut dans ce bout de quarantaine que tu perdis ton frère ainé... Il avait cette croix dessinée à la craie sur ses vêtements, on l'avait isolé, et on avait attendu de voir si ta famille et toi déclariez les mêmes symptômes ou non. Mais il n'y eut que lui, déchirant ton palpitant, écorchant ce rêve qui semblait un peu moins beau à présent.
Vous aviez débarqué, alors que vous n'étiez plus que cinq. Obligés d'abandonner le cadavre de ton frère derrière vous. Ca avait détruit le cœur de ta mère, égratigné celui de ton père, mais il n'en montra rien. Pourtant, tu le vis, ce pli qui s'étira sur son front, ride supplémentaire, et l'éclat moins brillant dans ses prunelles, alors que ta mère pleurait silencieusement, priant dans ces murmures incompréhensibles. Tu l'avais vu, ton père, l'attirer dans ses bras, déposer ce doux baiser sur sa joue et glisser des mots que tu n'entendrais jamais à son oreille. Cet amour tenace, tu as su qu'il existait réellement dans ce rien que vous aviez, dans ce lien qui vous unissait, né tout d'abord entre ces deux êtres que tu aimais de tout ton cœur.
T'avais tout juste vingt-et-un ans et la vie aurait dû te sourire. Au lieu de ça, tu t'es vite rendu compte que New York était peut-être la nouvelle cité industrielle, mais que là-bas aussi, tu n'étais rien. Rien d'autre qu'un mineur... pour rapporter de l'argent à la maison, pour aider ton père à veiller sur les autres. T'avais été projeté au rang de frère ainé à présent, responsabilité dont tu te serais bien passé pourtant. Responsabilité qui n'aurait jamais dû s'échapper des épaules de celui que tu avais perdu. D'une manière ou d'une autre, t'aurais tout de même travaillé, tu le savais. Alors, chaque matin, tu t'enfouissais sous terre, comme si le soleil déjà te maudissait, ou que tu le craignais suffisamment pour t'exiler loin de sa caresse. Ta peau perdait de son hâle, si pâle que les ténèbres t'épousaient sans doute déjà sans que tu ne le saches. Et pourtant, chaque fois que tu retournais dans les ténèbres, c'était l'esprit hanté par la vision de cette jeune fille que tu apercevais toujours à la même heure. Jade Hamilton. Elle était la fille d'un riche homme d'affaire... et tu n'étais rien d'autre qu'un misérable mineur qui n'attirerait jamais son attention. Pourtant, elle était cette douceur qui te faisait tenir, celle qui te faisait avancer. Elle était l'égérie de cet avenir meilleur qui t'échappait pourtant toujours. Celle dont tu n'oserais jamais attirer l'attention...
Et puis un soir, quand t'es rentré, le corps sale et meurtri par ta journée, tu t'es heurté à ta mère en larmes, aux propos décousus. Mais tu as compris l'essentiel, Rafael avait décidé de vivre autrement, refusant de finir dans les mines comme son père et lui, il avait dit adieu, préférant vendre son corps.
Va le chercher, Adis, s'il te plaît, va le chercher. t'avait-elle supplié, et tu n'avais pas hésité. Si épuisé étais-tu, à peine un peu d'eau sur ton visage et tu avais traversé New York pour te rendre au bordel en question. Tu avais payé pour qu'on te fiche la paix, qu'on te laisse lui parler... à ton petit frère d'à peine quinze ans. Tu lui avais ordonné de rentrer, que ce n'était pas une vie, et il t'avait jeté au visage que la tienne n'était pas mieux, qu'elle était pire. T'aurais voulu l'arracher de ce monde. T'aurais voulu pouvoir le faire changer d'avis. Vainement. T'étais ressorti de la chambre bredouille, la rage au vendre, et des catins cherchant à t'attirer dans leurs filets. Mais t'avançais, tu rebroussais chemin, las, comme si tu portais un poids sur tes épaules.
Ce fut à cet instant que tu le rencontras pour la première fois, Dimitri. Il était beau, richement vêtu, silhouette élancée, sculptée pour attirer le regard. Tu avais senti sa main sur ton bras, t'incitant à croiser ses prunelles, à s'attarder brièvement sur ce sourire qui se voulait rassurant, frauduleuse invitation.
Suis-moi, et je t'offrirai la vie éternelle. Ca t'avais fait rire sur le coup. L'homme devait être fou. Tu avais reculé, peut-être que quelque chose te dérangeait chez lui finalement, sa pâleur... mais tu n'étais guère mieux. L'éclat particulier de ses iris, peut-être alors ? Tu n'en savais trop rien, mais cela ne t'inspira pas suffisamment confiance pour faire trainer la discussion. Tu n'avais pas pris le temps de croiser son regard une seconde de plus. Tu lui avais juste répondu que tu n'étais pas intéressé. Et puis tu l'oublias...
A la place, tu sentis ton état de santé se dégrader, des douleurs, des vertiges, des pertes de connaissances, une perte d'appétit, des sueurs... la même maladie que celle qui avait dérobé la vie de ton ainé, te dévorait de l'intérieur, et tu n'y pouvais rien. Tu allais mourir. Tes parents et ta sœur le savaient, et s'y résignaient déjà. Vous n'aviez pas l'argent pour pouvoir te soigner. Un soir, tu as quitté votre appartement, traversant New York pour la dernière fois...
I don't quite know how I feel
1903 : New York
Des sueurs divaguent sur ta peau, tu sens cette douleur, ce reflet du monstre qui se repaît de tes entrailles.
Tu seras mort à l'aube, semble te murmurer une petite voix dans ton esprit. Mais tu veux revoir Rafael... une dernière fois. Tu veux lui dire adieu, peut-être même chercheras-tu à le convaincre de tout abandonner et de revenir à la raison. Peut-être... mais tu n'en as pas le temps, une perle glisse sur ta joue, cela devient trop difficile de lutter contre les ténèbres, et tu t'écroules, la main tendue vers l'écriteau du bordel que tu entrevois une dernière fois avant que l'obscurité t'engloutisse.
~ Tu ouvres les yeux, et tu as surtout cette impression de suffoquer. Il n'y a pas d'air, tu le sais, tu le sens. Pas que tu en ais besoin, mais cela te pousse à creuser sous l'idée dérangeant que tu n'as plus besoin d'air, que tu es peut-être déjà mort. Mais tu bouges, tu sens la terre te laisser grimper dans ses entrailles, tu la sens qui te livre passage, jusqu'à ce que tu en émerges finalement sous le ciel obscur de la nuit. Tu avales une gorgée d'air, celle qui te rassure, qui laisse ce goût terreux sur ta langue mais dont tu te moques. Mais ce fut à cet instant que tu la vis, cette ombre familière, cet être qui ne t'es pas inconnu, auquel tu voudrais demander...
Bois. t'ordonne-t-il, et cela semble réveiller ce monstre tapi au sein de ton être, cette faim tenace qui te pousse à lui obéir, à saisir le bocal qu'il tient entre ses doigts. Tu te redresses et le lui prends. Juste l'instant qui précède celui où tu commences à boire. Nectar divin qui glisse et s'insinue dans ta gorge, sur ta langue, qui vient pourlécher tes lèvres lorsque tu laisses retomber le bocal au sol, vide. Tu n'as pas conscience... de ce que tu es devenu, de ce que tu viens de boire. Tout ce que tu ressens c'est que tu te sens bien à cet instant. Odieuse vision du sang qui s'attarde sur tes doigts, tu préfères clore tes paupières, te laisser envahir par ces bruits méconnus qui t'enveloppent pourtant. Ils sont là, comme si le monde était brusquement différent.
Viens avec moi, veux-tu. te souffle alors l'inconnu sur lequel tu reportes ton regard.
Tu l'avais suivi jusqu'à cette demeure qui était sienne, dans laquelle tu découvris un véritable lit, des vêtements que l'on te tailla sur mesure. Tu n'étais plus réellement toi à son contact. Les yeux plissés, il t'avait fallu une trop longue semaine pour comprendre ce qu'il avait finalement fait de toi. Que tu étais à présent un vampire. Une créature impie et contre nature, voilà ce que tu étais devenu à tes yeux, contraint de te nourrir de sang... ton créateur voulait t'apprendre à hypnotiser, à doser la prise de liqueur à la gorge des mortels pour ne pas laisser de cadavre derrière toi. Il voulait vraiment, mais c'est toi qui refusait. Tu ne voulais pas être une abomination. Ta mère te condamnerait aux enfers si elle savait. Ton père te renierait à la seconde même où il te croiserait. Et toi, tu savais que le ciel allait se détourner de toi, que tu aurais dû être mort. Que tu l'étais d'une certaine façon, ton cœur ne battait plus, organe trop silencieux dans ta poitrine. Lorsque tu l'as pleinement réalisé, tu as pris ce couteau et tu t'es entaillé les veines, encore et encore, du sang s'était écoulé, mais la plaie s'était refermée, comme si la mort elle-même ne voulait plus de toi. C'est taché de ton propre fluide que ton créateur te trouva cette nuit-là, éclatant d'un rire malsain. Dimitri était instable. Il était également trop seul depuis trop longtemps. Tu le ressentis comme une gifle, il avait besoin de toi, comme tu aurais voulu prendre soin de ton frère ainé à l'époque. Le protéger de lui-même. Alors tu avais accepté de continuer à fouler le sol, gravant néanmoins à même ta chair les noms de chaque membre de ta famille, ceux que tu ne reverrais jamais.
Would you lie with me and just forget the world ?
1903 - 1907 : New York
Ta vie était différente à présent. Tu étais différent. Ton sire t'apprenait à te contrôler, à ne prélever que l'essentiel à plusieurs gorges, à manipuler tes nouvelles capacités, à vivre telle une créature de la nuit, en harmonie avec le reste du monde. Ou plus précisément, en ne se faisant pas remarquer plus que nécessaire. Et lorsque tu t'en sentis capable, tu ne pus résister à ton désir de revoir Jade, cette pierre précieuse que tu n'aurais même jamais pensé pouvoir approcher un jour... t'étais brutalement accessible, parce que tu portais de beaux costumes, et que ton créateur t'avait appris à évoluer dans cette bonne société. Alors tu l'as provoquée, cette première rencontre, sous l'œil désapprobateur de Dimitri. Pourtant, il ne t'expliqua jamais pouvoir il voyait cela négativement, il te laissa faire l'expérience. Échanger quelques mots avec la mortelle, apprendre à sourire et à rire de cette vie tellement plus simple que celle que tu avais alors connue jusqu'ici. Jade te rendait heureux, la saveur de ses lèvres t'étourdissait à chaque baiser que vous échangiez. Tu aurais voulu la dérober, telle une princesse de conte de fées, mais pour lui offrir quel genre de vie ? Toi-même, tu te considérais comme un monstre, alors comment pourrais-tu lui infliger cela ? Tu savais tous ces regrets qui te hantaient, cette vie que tu aurais voulu tienne à ses côtés, ces rires d'enfants qui auraient empli votre maison, et cette vieillesse qui serait venu vous chercher. Mais il n'aurait voulu que d'elle, toi, créature impie, tu serais resté le même. Tu les avais oublié, ces détails pourtant si importants. Tu t'étais contenté de vivre, d'apprécier sa présence, de lui voler quelques baisers, mais jamais plus. Jusqu'au jour où elle te supplia de te placer comme prétendant avant que son père ne la pousse à en épouser un autre. Tu ne le pus, tu refusas, cette douleur infime dans ta poitrine. Tu aurais voulu, mais le temps ne s'écoulait plus pour toi, et tu ne vivais que de nuit aux yeux du monde.
Tu avais tout d'abord pensé pouvoir devenir son amant, mais la vision de Jade dans une robe trop blanche, et trop parfaite, et l'idée de son mariage à un autre, de ces enfants qui ne seraient pas les tiens, t'avait rendu fou. Elle te cherchait dans la foule ce jour-là, tu le sais. Elle te chercha parmi les convives cette nuit-là, tu le sais également. Mais tu n'y étais pas. Tu n'y serais plus jamais. Tu t'étais contenté de lui laisser une lettre qu'elle découvrirait dès qu'elle pourrait se rendre là où vous vous retrouviez en cachette, pour des instants plus privilégiés. Celle où tu lui disais adieu, où tu avais abandonné ton cœur meurtri. Tu l'avais observée les nuits suivantes pourtant, à rôder tel un prédateur, mais la vision de sa vie te détruisait à petit feu, alors tu as quitté Rome aux côtés d'un Dimitri qui te vantait les mérites de la capitale italienne, votre destination. Mais tu avais l'impression d'être mort une nouvelle fois, que tu retournais sous la terre, à supporter cette sensation d'étouffement trop familière.
Jade... combien de portrait de ta joconde as-tu dessiné ? De ces instants volés que tu reproduisais alors que vous traversiez l'océan sur un nouveau bateau, dans des conditions si différentes de la première fois. Ton regard se noyait sur les passagers, tes crocs venaient se repaître de cette étincelle de vie dont tu prenais un lambeau lorsque la faim te taraudait. Sans Dimitri, peut-être aurais-tu préféré mourir à nouveau, tenté de t'arracher la vie. Car ces instants délaissés... cette vie que tu rejetais... avait été les plus précieux de ton existence. Tu t'étais senti vivant pour la première fois de ton existence, et tu aurais préféré être mort, réellement que de ressentir ce gouffre béant dans ta poitrine.
If I lay here
1907 - 1998 : Rome
Rome. Elle était belle cette cité millénaire. Elle se dressait, comme intemporelle et immortelle face au temps qui s'écoulait. Ce fut entre ses murs que tu décidas de vivre, dans l'ombre du monde, aux côtés de ton créateur, goûtant au plaisir qui croisait ta route, arrachant à tes lèvres taciturnes un sourire ou un désir. L'excentrique Dimitri te trainait parfois en Europe, pour te faire voir d'autres pays, d'autres personnes. Il te laissait également, quelques mois, avant de revenir, de te retrouver, de te raconter ses mésaventures. Il goûtait parfois à tes lèvres, comme l'aveu inavouable de son besoin de toi, de soigner tes plaies béantes mal cicatrisées qui s'attardaient à ton palpitant inerte. Des nuits communes ont fardé ces années écoulées, mais il ne fut jamais jaloux d'un autre. Lui qui pourtant ne voyait le monde qu'à travers toi. Dimitri, tu le savais, aurait fait n'importe quoi pour te redonner le sourire, pour te faire savourer cette éternité que tu lui vouais à présent.
La guerre mortelle frappa, vint toquer à votre porte, et tu assistas à ce monde égaré, à ce fanatisme dérangeant, à ces paroles à la fois odieuses et magnifiques qui se glissaient dans les cercles nocturnes qu'il t'arrivait de fréquenter. Toi, l'amateur de mode, toujours tiré à quatre épingles, à l'allure négligée tellement travaillée, à ces costumes qui s'attardaient divinement sur ta peau. Tu t'ouvris à l'art avec un grand A. Tu te laissas porter par ces saveurs particulières, par ces époques qui se voulaient changeantes, laissant Dimitri se montrer, tandis que tu restais inexorablement dans son ombre. A quoi bon vivre au grand jour, selon l'expression plutôt ironique lorsque l'on parle de vampires. Pourtant, tu suivis les modes avec attention, les changements qui ondulaient à travers les années s'écoulant, appréciant ou non certaines époques qui ne parvenaient à trouver grâce à tes yeux. Les années 80 furent sans doute les pires de toutes. Et puis les années 90 chassèrent la mode ridicule des cheveux longs, de ce gel excessif dans les cheveux, de ces cheveux ressemblant plus à du carton qu'à autre chose. Tu vivais malgré tout. Tu vivais, pour celui qui était comme un frère à tes yeux, ta véritable famille, celle pour qui tu ferais n'importe quoi. Mais que des néphilims t'arrachèrent lors de la grande guerre.
If I just lay here
1998 - 2003 : Rome
Tu n'en connais pas l'abjecte raison, car Dimitri ne le méritait pas. De mourir, de trépasser pour de bon. Tu avais besoin de lui, mais on te l'avait pris, et avec lui, ce lambeau de lumière dans l'obscurité. Seule ton désir de vengeance te maintint en vie. Toi qui ne voulait pas t'en mêler, se retrouva pleinement mêlé à tous ces affrontements, certain qu'une fois ta vengeance menée, il serait temps de t'exposer à la lumière du soleil une toute dernière fois. Redécouvrir la chaleur des rayons, t'y offrir sans remord, sans regret. Tu y aspirais, à cette mort, à ce repos éternel, toi qui n'avait de créature obscure que le nom, car tu n'avais rien de ces cruelles engeances aspirant au pouvoir. Toi, tu n'en voulais pas. Non, tout ce que tu désirais, c'était cette vengeance, voir les néphilims périr, tous autant qu'ils étaient, pour ce crime, celui de t'avoir pris ton créateur.
Tu assassinas l'un d'eux juste avant qu'il ne tue l'une d'entre vous, cette vampire tombée au sol, recouverte du sang de l'ennemi, qui porta sur toi un regard chargé de tant de choses que cela te laissa te rembrunir. Le front plissé, tu t'apprêtais à te détourner, lorsqu'elle se redressa, venant saisir ton bras.
S'il te plait, ne me laisse pas. avait-elle soufflée en cherchant à te dérober un baiser. Déjà ses lèvres glissaient sur ta gorge, alors que le cadavre encore chaud de l'ennemi se trouvait à côté d'eux. Tu l'avais repoussée d'un simple
Arrête. Mais elle n'avait pas voulu accepter, se rapprochant à nouveau de toi, son corps se lovant désespérément contre le tien, ses doigts glissant sur ton torse, cherchant à s'insinuer sous le tissu.
Je ferai tout ce que tu veux, mais ne me laisse pas toute seule. suppliait-elle à présent. Tu le sentis, ce maigre pincement à ton myocarde muet. Cette sensation de voir en elle ce petit frère qui avait préféré se prostituer plutôt que de vivre la vie misérable à laquelle chaque Fernandez était condamné.
Tu n'es pas obligée de faire ça. soufflas-tu en capturant ses poignets pour qu'elle cesse, le regard dur s'enfonçant dans le sien. Tu la vis tenter d'ouvrir les lèvres, et ton regard se plissa un peu plus, pour la pousser à garder le silence, tandis que tu ajoutais simplement
Je t'emmène avec moi.Tu avais alors vu le soulagement se peindre sur ses traits, et la relâchant, tu l'avais ramenée dans la demeure que tu partageais avec Dimitri autrefois. La laissant se laver, se changer, tandis que tu en faisais autant. Là, elle te compta sans que tu ais besoin de lui poser la moindre question qu'elle n'avait que quelques années vampiriques derrière elle, que son créateur l'avait tiré d'un bordel où elle officiait, et qu'elle était seule à présent. Tu t'en serais passé, de sa présence. Toi, tu voulais t'offrir au soleil, tu voulais enfin crever définitivement... mais elle te le soufflait chaque nuit, qu'elle avait besoin de toi, que tu l'avais sauvée, qu'elle ne s'en sortirait jamais sans toi. Elle aussi haïssait les Néphilims, mais plus parce que toi, tu les haïssais que parce qu'ils lui avaient pris son sire. En vérité, elle te l'avoua une nuit, sa mort était un bienfait, car elle t'avait fait croiser ta route. A croire que tu valais mieux qu'un autre, ce n'était pas ton avis, mais une simple réplique sarcastique venait noyer tes lèvres lorsque tu l'entendais discourir ainsi.
Et puis, d'autres vampires vous ont rejoint, te suivant dans ta haine des Néphilims, te suivant, toi, parce que tu prenais soin d'eux, parce que tu préféras prendre tes distances avec les affrontements pour les protéger. Ils t'aiment à leur façon, tout comme tu les aimes à la tienne.
Let's waste time
2003 - 2018 : Rome
Ton clan t'a redonné vie, t'as permis de finalement pas sombrer dans l'oubli. Tu aurais pu pourtant, t'offrir la brulure solaire, mais leur présence t'en a empêché. Tu as reculé face au trépas annoncé, et tu as préféré les protéger, les préserver, malgré ta haine manifeste envers les Néphilims. Tes propres règles servent à assurer leur sécurité, à les préserver, à enraciner les règles émises par le consul.
- Ne pas chercher inutilement le conflit.
- Ne pas tuer sans une raison valable une personne.
- Ne posséder que deux sources humaines, libres de s'en aller, ou se nourrir à des poches de sang.
- Ne pas transformer de terrestre, sauf danger de mort imminente ou mariage.
- Ne pas faire de mal à un terrestre.
- Les membres du clan se protègent entre eux, ils sont les membres d'une même famille.
- On déteste les Néphilims. Ils sont néfastes.
- La famille Lightwood et Cornaro sont intouchables par les Créatures Obscures et doivent être respectées.
Cette dernière règle n'est pas de toi. Cette dernière règle t'emmerde bien certains jours, tu dois bien le reconnaître. Surtout depuis qu'Ezekiel semble rôder un peu trop souvent autour de toi ces derniers temps. C'est un Lightwood, et par conséquent, un être intouchable que tu te dois de respecter. Tu t'en serais bien passé, alors qu'il se retrouve un peu trop souvent sur ta route pour que ce ne soit que le résultat du hasard. Il insiste pour t'offrir un verre, une cigarette... qu'importe. Si tu fumes, si tu bois, tu ne peux pas accepter ce qu'il te proposer. Tout simplement parce que ce serait renier tout ce en quoi tu crois. Tout simplement parce que son sang est un peu trop angélique pour toi. Il te déstabilise pourtant, te rend plus maussade, te fait perdre ton sarcasme à certains moments, te laissant te contenter d'un refus en pur et due forme. Tu ne le laissera pas t'atteindre, tu ne lui permettras pas de se glisser dans ton existence.
Pourtant, sans même t'en rendre compte, ton regard glisse parfois dans sa direction, plus encore en présence de Briana. Ce n'était pas prévu, de te rapprocher de la sœur d'Ezekiel. Mais comment aurais-tu pu deviner que la sorcière était liée au Lightwood, et qu'elle en était une également ? Tout ce que tu sais, c'est qu'elle t'a immédiatement rappelé l'espièglerie de Rafael, sa façon d'être, d'appréhender la vie, et que tu t'es attaché sans même t'en rendre compte. A tes yeux, elle est un peu un membre de ta famille, et tu as ce désir de la protéger qui crépite au fond de toi. Un peu seulement, car son nom la relie à ce que tu rejettes encore avec détermination... ce sang angélique. Aussi, tu restes malgré tout sur tes gardes en sa présence, même si tu aimes passer du temps avec elle, qu'elle parvient parfois à t'arracher un sourire. Mais elle te perce à jour, elle devine ton intérêt pour son frère. Intérêt que tu nies, que tu rejettes, que tu assassines avec détermination. Parce que tu le sais, sans l'obstination dont tu fais preuve, tu pourrais te laisser aller, rien qu'une fois, mais cela briserait tes convictions et tu t'y refuses. Tu ne peux que le rejeter, que le haïr pour ce qu'il est, te montrer froid, distant, lui envoyer un ou deux sarcasmes en pleine face pour qu'il arrête de t'emmerder et de te suivre. Qu'il comprenne enfin que tu n'es pas intéressé. Toi, qui sans les tiens, n'aurait strictement plus aucune raison de vivre, et de fouler le sol de ce monde qui tourne en rond. Toi, qui n'accorde aucune confiance en les Néphilim.
La nuit t'a semblé longue, interminable, ton chemin ayant une nouvelle fois croisé celui du néphilim, et tu te sens à fleur de peau. Une cigarette terminant de se consumer à tes lèvres, tu pénètres dans ce qui sert de demeure à ton clan. Tu n'as le temps de ne faire que quelques pas lorsque Sam se dresse devant toi.
Devine quoi ! Tu inspires, tu sens déjà ce qu'elle dissimule dans son dos, mais tu ne lui retireras pas la possibilité de te faire la surprise, même si, il faut bien le reconnaître, tu t'en serais bien passé. Tu hausses un sourcil, posant sur elle un regard inquisiteur à la limite de la lassitude. Mais elle ne le prend pas pour elle, jamais. Elle a appris à te connaître, elle sait combien la vie te semble parfois insipide, et elle ne cesse de faire en sorte de te rattacher au monde.
Nous avons un nouveau membre du clan ! déclara-t-elle fièrement, en sortant de derrière son dos un chaton, petite boule de poile fragile qui t'adresse un regard à faire fonde une madone. Sauf que tu n'en es pas une. Que cet animal n'a rien à faire dans votre vie, mais tu la regardes l'étreindre et déposer un baiser au sommet du crâne poilu, et déjà ta détermination fond comme neige au soleil. Que ne ferais-tu pas pour elle ? Pour eux ? Tu as renié ta vendetta pour leur sécurité.
Il est mignon, non ? Adorable. répliques-tu d'un timbre involontairement noyé de sarcasme.
Arrête de jouer les vieux blasés, Adis, et prend-le. Elle te tend l'animal et te le colle dans les bras. Ce n'est pas un manque de respect, loin de là, tu vois clair dans son jeu, tu sais qu'elle cherche à te redonner goût à la vie par tout un tas de stratagèmes. Ta main effleure les poils de l'animal qui te regarde attentivement, comme captivé par celui que tu es. Mignon, c'est le mot, et peut-être finira-t-il par trainer dans tes pattes à l'occasion. Un autre égaré mené tout droit dans ton existence. Tu le lui redonnes, avant d'épousseter tes vêtements hors de prix, à la dernière mode du monde actuel. Celui où tu dessines des vêtements, où tu existes grâce à l'une de tes passions.
Je ne joue pas les vieux blasés... la preuve, il peut rester. Mais elle a raison, tu es un vieux blasé, tout simplement parce que tu continues de vivre sans réelle conviction, sans véritable désir qui te serait propre. Non, il n'y a que eux qui te maintiennent en vie, et tu le sais. Tu la vois sourire, avant de venir déposer un baiser sur ta joue en te serrant contre elle, et de s'éloigner avec la boule de poils dans les bras. Et tu surprends un léger sourire flâner sur tes lèvres l'espace d'une seconde. Presque une chimère qui s'évapore déjà.