A Kildary, comme dans le reste des Highlands d’ailleurs, il ne faisait nuit que quelques heures par nuit. Comme l’Ecosse lui manque parfois, surtout lorsqu’il sait quelles créatures marchent parmi les humains.
Mais Adam  chasse l’Ecosse de ses pensées. Cela fait des années qu’il l’a quittée. C’est Rome sa vie maintenant. C’est Rome qu’il a choisie lorsqu’il a découvert ses rues pavées, ses fontaines à chaque coin de rue, ses magnifiques ruines antiques, les statues, l’architecture de la Renaissance. Si différente de l’Écosse, de ses landes immenses et désertiques, de ses lochs profonds et mystérieux.
Ne pense plus à ça. Pense à autre chose. Pense à ta mission. Mission. Adam sort de sa torpeur mélancolique, sirote le café qu’il tient entre ses mains. Réprime une grimace. Il déteste le café, mais ça, personne ne le sait. Ses lunettes de soleil baissée, il est assis à la terrasse d’un bar, regardant la porte d’entrée close de l’autre côté de la rue. Une porte magnifique. Et ancienne. Ce qui l’intéresse, ce sont  ceux qui en franchissent le seuil. Adam les compte, un à un. Adam inscrit leurs visages dans sa mémoire. Adam est un espion. Et il espionne.
Une femme s’approche de lui, elle lui sourit. Adam voudrait ne pas lui retourner, pourtant il le fait. Il ne sait trop bien ce qu’elle veut. Ce qu’il ne peut pas lui offrir. Il n’a pas le temps. Pas l’envie. Toutes ses relations sont vouées à l’échec. Un jour, il aimerait que ça marche, mais il sait que ce jour n’est pas arrivé. Elle lui demande son nom. Ses lèvres se retroussent en un sourire plus large, tandis qu’il répond simplement :

« Declan. »

Declan. C’est ainsi que sa mère l’appelait. Elle aurait voulu qu’il soit nommé ainsi. Un prénom irlandais, comme elle. Son père avait refusé. Il préférait un prénom écossais. Ils avaient tranché : Adam. Adam, le premier homme. Le premier aussi qui s’était laissé berné par une femme. Declan, c’était le nom qu’il utilisait souvent. Parfois il se présentait comme Adam, parfois comme Declan. Cela dépendait de qui il avait en face. Parfois même, c’était sous une autre identité.
Il parla quelques minutes avec la belle italienne, dans sa langue. Une langue qu’il maîtrisait aussi bien que l’anglais et que le latin, sans compter le gaélique.
Il était arrivé à Rome des années auparavant, huit, si sa mémoire était exacte. Il était en train d’écrire sa thèse et était allé sur le terrain. Il connaissait déjà Rome pour y être allé, mais avant, ce n’étaient jamais des longs voyages. Il y était allé. Peu lui importaient la situation dans la ville et en Italie. Il n’allait pas gâcher toutes ses années d’études. Pas alors qu’il touchait presque au but.


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