Je grimace légèrement alors que la porte claque derrière ma sœur et j’écoute pendant quelques instants ses pas claquer fortement dans les escaliers d'une façon… énervée. Ouais, définitivement énervée. Je suis presque sûr qu’elle vient de claquer la porte d’entrée, d’ailleurs. Meilleure preuve comme quoi j’ai vraiment poussé le bouchon.  

Histoire de marquer ma frustration – même si plus personne n’est là pour en profiter - je souffle fortement et m’écroule dans le canapé, m'enfouissant dans les trop nombreux coussins qui y traînent. Mes yeux trainent autour de moi alors que j’essaie de forcer mes muscles à se décrisper ; ça me fait toujours comme ça quand on se dispute elle et moi. Et regarder c't'appart ne m’aide pas à me calmer, en vrai... On essaie au mieux de le rendre le plus… accueillant possible, mais y a rien à faire. C’est pas chez moi, ces murs, c’est pas les miens. C’est… c’est impersonnel, c’est froid, c’est comme toute cette ville, froide et dangereuse. Pas du tout accueillante. Ça fait juste quelques semaines qu’on est ici et je rêve juste de repartir, de me casser, de retourner en Sicile. Malgré les efforts de Neiza, malgré les photos sur les meubles, les coussins colorés, tous les efforts pour faire comme si c’était chez nous, c’est pas le cas. C’est pas mon territoire et je m’y sens… je sais pas… tellement mal ? C’est pas chez moi, j’arrive pas à l’assimiler à mon territoire, j’y arrive pas… C’est comme si j’étais un étranger en terre inconnu.


Essaie de sortir un peu, rencontre des gens, va voir ta futur fac ! Sérieux Kaled bouge-toi le cul ou j’apprends un sort pour te foutre dehors et t’empêcher de rentrer tant que t’auras pas fait un truc utile ! Je grogne en entendant la voix de Neiza résonner dans mon esprit. Elle a sans doute raison mais… on est arrivé ici il y a pas si longtemps, n’est-ce pas ? Okay d’accord ça fait quand même quelques semaines mais voilà. Faut me laisser le temps. Je sais que je l’inquiète plus que je l’énerve - elle a l’habitude que je sois toujours en vadrouille et là je reste prostré à l’intérieur—mais j’y arrive pas. J’arrive pas à dépasser tout ça. J’lui ai promis que je chercherais un boulot pour l’aider avec les factures et j’ai encore rien fait… la honte me fait me recroqueviller un peu plus sur moi-même et, comme à chaque fois qu’on peut se disputer tous les deux, je m’en veux beaucoup trop. J’ai l’impression d’être un incapable, cette impression de peur de l’extérieur me donne juste la sensation d’être pitoyable. Il est beau le loup garou sans peur et sans reproches. Sans compter mon hyperactivité que l’enfermement fait redoubler, me rendant cinglé et sans doute encore moins contrôlable qu’avant. Déjà que j’arrive plus vraiment à me contrôler en ce moment...

Roulant sur le dos, j’observe le plafond d’un air désabusé. J’ai pas la moindre envie de sortir mais… Neiza n’a pas mérité ça, elle s’épuise à nous fabriquer une vie, ici, je peux pas tout gâcher comme ça… j’ai pas envie, mais peut être que je peux au moins essayer de lui faire plaisir ? Juste un peu ? Peut être… juste aller voir la fac. J’suis déjà inscrit pour la rentrée mais je pourrais aller jeter un œil, voir comment elle est… histoire de me repérer. Ça lui ferait plaisir, non ? J’hésite pendant un moment, gigotant sur les coussins en pesant le pour et le contre. Les rares fois où je suis sorti, c’était avec ma sœur, ma fierté en prend un coup quand j’y songe et je fini par me lever, lentement. C’est juste pour lui faire plaisir. Juste pour lui montrer que je peux le faire. Pour ma fierté aussi, un peu.



C’est seulement une demi heure plus tard que je mets le nez dehors – j'ai hésité, tourné mille arguments dans mon esprit avant de réellement me décider—et je me stoppe au pas de la porte, fronçant le nez et inspirant profondément. L’air est plus pollué ici que chez nous—en Sicile- mais ça fait du bien malgré tout, quelque part. Je suppose.

Le soleil tape fort- on est au début de l’été après tout- et je sens presque la bête en moi couiner de joie. Un faible sourire m’échappe à cette sensation et je relâche un peu la poigne de fer que je maintiens sur lui à cause de ma peur de perdre les pédales pour rien du tout. Il y a un peu de monde, du bruit, des rires… le quartier ou on vit est beau, bruyant mais beau. Des petits commerces, des bâtiments anciens… j’aime bien, je m’en veux presque de bien aimer, en fait. Me dégourdir les gens me fait un bien fou et je comprends un peu ma sœur, elle arrivait juste plus à me gérer moi, mon loup et mon hyperactivité, je devenais invivable. Je sais pas comment elle a fait pour ne pas essayer de me mettre dehors à la main, à force. Soupirant doucement, je pince les lèvres en apercevant au loin un attroupement, des personnes qui se disputent. La police commence à arriver et, n’ayant pas envie de me retrouver là-dedans, je dévie dans une rue plus petite. Il y a moins de monde et mes épaules se détendent. Je laisse mes pas me guider— je chercherais la fac plus tard, là je veux juste traîner. M’habituer. Apprendre ce nouvel endroit - et un bruit particulier me fait tiquer et pencher un peu la tête, cherchant à le reconnaître. Curieux, j’en cherche l’origine et fini par débarquer dans un petit renfoncement, un peu à l’écart des gens. Sous mes yeux surpris, une jeune femme—fille ? Elle a L’air un peu plus jeune que moi peut être- est visiblement prise d’une inspiration profonde et tague avec enthousiasme le mur. Silencieux—elle m’a visiblement pas encore entendu—je reste la à observer le dessin qui né sous ses gestes et sous les coups de bombe, essayant de deviner de quoi il s’agit, la tête penchée et la mine d’un chiot curieux plaquée sur le visage.  

L’odeur de peinture en spray agresse mes narines et m’empêche de sentir quoique ce soit d’autres- et c’est assez gênant pour moi qui aime identifier les gens par leur odeur d’ailleurs. M’appuyant contre le mur derrière elle, je fini par me manifester d’un raclement de gorge. « Hey, sympa ton coup de bombe. Par contre, je sais pas si ça t’intéresse mais il y a les flics, pas loin d’ici. A moins que t’ai envie de leur faire un petit coucou, bien sûr. » Pour l’instant personne ne vient mais... Aucune idée de s’ils vont venir dans le coin ou pas, vu l’heure ça pourrait tout aussi bien être le propriétaire du lieu qui se pointe et pas sûr du tout qu’il aime ce qu’elle est en train de faire. Mais si c’est ultre stylé. J’la connais pas, mais j’aime bien son audace. Et je suis dans une telle période de déprime et de solitude en ce moment que rester ici avec une nana qui tag un mur à deux pas d’une rue passante me semble être une idée parfaite.

Ou alors c’est juste ma tendance à plonger dans les ennuis qui se réveille d’un seul coup. C’est probable.

Je ne savais pas quoi faire, aujourd'hui et je tournais comme un lion en cage. Je n'avais pas d'amis avec qui traîné en ville, même si cela faisait presque deux ans que nous étions en ville. Le fait d'être viré systématiquement m'empêchait de rester suffisamment longtemps pour me faire des amis. En avais-je réellement besoin de toute façon ? J'avais ma famille et la meute. Pas besoin de plus, du moins je le pensais. Ce qui était assez étrange, parce que j'étais une fille assez sociable, mais... Mais j'avais la fâcheuse manie de toujours dire ce que je pensais et pas toujours avec tact, ce qui devait en refroidir plus d'un. Et puis le fait que je mette souvent le feu à des choses n'aidait sans doute pas à nouer des liens. Tant pis ! Je déambulais sans but dans l'appartement ce qui agaçait fortement Lore-Ann, ma grande sœur adoptive. Je pense que je la testais pour savoir quand et comment elle allait péter les plombs. Au bout de cinq minutes, je l'entendis soupirer et elle releva enfin la tête de son bouquin. " Tu veux pas allez prendre l'air ? Il fait beau." " Toute seule ? J'ai pas envie..." Je remarque son sourire en coin avant qu'elle ne reprenne. " Va au parc ou dans les endroits où les ados comme toi traînent, mais par pitié sors d'ici tu va me rendre folle." Les jeunes comme moi ? Je hausse un sourcil, mais n'ajoute rien. Je souris et je quitte la pièce pour aller dans ma chambre. Restant plantée debout pendant de longues minutes, j'étais en train de réfléchir à ce que je pourrais bien faire. Et l'idée m'apparut soudainement. Je me penche et retire une boîte qui se trouvait son mon lit. Dedans, il y avait des bombes de peinture, je m'en servais des fois pour tagguer des murs. Même si j'avais promis à papa d'arrêter, c'était quand même moins risqué que de mettre le feu à tout et n'importe quoi, non ? Contente d'avoir eu cette idée, je mettais les bombes de peinture dans un sac et quittai la chambre en sautillant légèrement, je passe devant ma sœur qui me regardait d'un air un peu septique. " Je sors ! Et ne me regarde pas comme ça, promis je ne vais pas allumer un feu." " Ne t'attire pas d'ennuis, sinon papa va te tuer cette fois-ci." Je lève les yeux au ciel. " Oui maman..." Elle grogne légèrement et je quitte l'appartement avant qu'elle n'ajoute autre chose. Une fois dans la rue, je marche un peu au hasard, mettant mes écouteurs dans les oreilles et regardant mon téléphone pour savoir quelle playlist j'allais pouvoir écouter. Je choisis un ancien album de Muse et chantonne légèrement tout en marchant. Je souris en voyant mon reflet dans les vitrines devant lesquelles je passais. Je ressemblais à une adolescente sage et gentille. Un visage d'ange comme dirait certains. Maman me disait souvent que j'étais la plus belle fille au monde, sans doute parce que j'étais sa fille. Elle me manque. Atrocement, même si je ne laisse rien paraître. Je me dois d'être forte, pour Louis-Félix et pour papa aussi. En me voyant, personne irait penser que je suis une créature obscure, un loup-garou précisément. Personne ne penserait que je suis également une pyromane en puissance. Mais, je fais attention, je fais en sorte de ne mettre personne en danger et j'essayais de me contenir un maximum. Tagué un mur, c'est rien à côté, mais les gens n'aiment pas vraiment ça. Sans doute parce que la plupart des tagueurs le font sans avoir de fibre artistique. Je ne suis qu'une débutante et ce n'est qu'un passe-temps, mais j'aime à croire que j'ai un certain talent pour ça. Je ne me débrouille pas si mal que ça en réalité. Je m'éloigne de Monti et je ne fais pas spécialement attention au nom du quartier, cela n'avait pas vraiment d'importance. Je préfère être dans les petites rues, pas loin d'une grande artère pour pouvoir fuir si possible. Toujours cet instinct qui guide mes pas. Même si je ne l'écoute que rarement, je dois bien l'avouer. J'ai toujours la fâcheuse manie de me mettre dans le pétrin et pas qu'un peu, mais je m'en sors toujours bien. Bon, sauf cette fois, où j'ai foutu le feu au gymnase, ça.... Je n'ai pas vraiment pu le nier, même si j'ai donné une version ou ma responsabilité était atténuée. Et j'ai été virée. Et là, je trouve l'endroit idéal. Un large sourire se dessine sur mes lèvres. Toujours la musique en marche, j'enlève les bombes de mon sac et me mets au travail. Le principe, c'est qu'il faut faire vite et bien. Et ne pas se faire prendre. Tout absorbée par mon œuvre, je ne remarquais même pas que je n'étais plus seule. Mais, lorsque j'entendis sa voix, je sursautais et me retournai prestement en enlevant mes écouteurs. " J'ai eu peur bordel !" Mon ton n'était pas agressif, j'étais juste surprise. Mon regard se posa sur lui et je l'oservais attentivement, mais avec l'odeur de la peinture dans les narines, je ne savais pas s'il était humain ou... Autre. Je repose les yeux sur ce que j'étais en train de faire et reculai de quelques pas pour avoir une vue d'ensemble. J'eus pourtant un sourire aux lèvres. " Merci ! Mais c'est pas ce que j'ai fais de mieux jusqu'à présent." Je secoue légèrement la tête et mes cheveux blonds volaient un peu autour de moi. Je soupire et reprends. " Vu que t'es là, tu peux faire le guet ? Que j'ai au moins le temps de finir." Je ne sais pas qui c'est et je m'en contre-fiche un peu. Il n'a pas l'air d'être méchant, en tout cas, la louve en moi ne se réveille pas. Signe qu'il n'était pas dangereux pour moi. Et puis il avait l'air d'avoir plus ou moins le même âge que moi, je le vois mal me dénoncer aux flics pas loin. Encore que le temps qu'il les prévienne et qu'ils arrivent, je serais déjà loin.

Codage par Magma.

Les bras croisés, je reste appuyé quelques instants contre le mur derrière elle, limite je pourrais paraître flippant pour quiconque passerait dans le coin. Genre le gars qui espionne une nana de façon absolument pas discrète. Manquerait plus qu’un bon samaritain passe par là, et je suis catalogué. Mais j’y peux rien, ma curiosité fait que j’ai envie de l’observer… Travailler ? Sur son dessin, envie de voir comment elle fait, comment elle s’y prend. Ça a un côté amusant, et un peu excitant aussi dans le sens où je suis sûr à quatre-vingt-dix-neuf pour cent qu’elle n’est certainement pas censée être ici, à faire ce qu’elle fait sur ce mur en particulier. J’ai aucune idée d’à qui il appartient exactement mais – malgré la qualité du dessin qui est très présente pour moi – je suis certain qu’il apprécierait pas du tout l’idée. Les gens sont d’un ennui à toujours vouloir rester dans les clous, dans les choses… Normales. Vraiment. Rien d’excitant. C’est le loup-garou qui vous parle.
… Bon, le loup garou qui reste actuellement cloitré chez lui en flippant à la simple idée de mettre le nez dehors, qui a peur de sa nouvelle ville et qui ne vit strictement rien d’extraordinaire depuis plusieurs semaines, mais c’est accessoire, ça. Complètement accessoire. Juste un temps d’adaptation… Incroyablement long, mais passons.

C’est au bout de quelques instants de curiosité intense que je fini par manifester ma présence et le fait qu’elle sursaute me fait ricaner de manière très visible, un sourire apparaissant sur mon visage en voyant son air surpris. Je hausse un sourcil quand ses écouteurs quittent ses oreilles, mon ouïe fine captant un peu plus clairement la musique qui s’en échappe jusqu’à ce qu’elle s’exclame, « J'ai eu peur bordel ! » J’affiche un sourire qui aurait pu être porteur d’excuse s’il n’était pas aussi large et malicieux, limite joueur. Oui, faire peur aux gens, ça m’amuse, faîtes-moi un procès. Je me soumets malgré tout à l’examen de son regard sans bouger ni broncher – après tout j’ai largement pu en profiter moi aussi à peine quelques instants auparavant, donc bon – et penche un peu la tête quand elle retourne son attention vers son dessin, reculant un peu comme pour mieux l’examiner. Instinctivement, je reprends une inspiration qui me fait plisser le nez, écœuré. Définitivement, cette peinture sent trop fort pour le bien de mon odorat et toute son odeur à elle semble… Emprisonnée sous celle-ci, trop dominante. Tant pis pour l’identification, c’est gênant mais passons. Il faudrait vraiment que je perde cette tendance d’ailleurs, c’est handicapant parfois. « Merci ! Mais c’est pas ce que j’ai fais de mieux jusqu’à présent ! » Je hausse un sourcil à ces mots – alors c’est une habitude pour elle de faire ce genre de chose ? En fait, j’aurais dû m’en douter, mais malgré c’qu’elle dit c’est loin d’être un gribouillis sur ce mur, limite c’est dommage qu’il soit autant à l’écart. Et si elle a fait mieux, j’ai juste envie de voir ce mieux, justement, ça m’intéresse. Mais j’ai pas le temps de répliquer qu’elle reprend après un soupir, « Vu que t’es là, tu peux faire le guet ? Que j’ai au moins le temps de finir ? »
J’ai une blague très très con en tête en mode jeu de mots avec sa phrase mais je me contiens – on se connait pas, ça serait dommage de la faire fuir avec mon humour… A toute épreuve – et à la place je fronce les sourcils, me redressant enfin du mur où j’avais fini par m’affaler ; tout en classe... Ou presque. Je croise les bras en l’observant, tentant de paraître vaguement menaçant… Tentant, ouais, c’pas gagné mais bon. « Tu demandes souvent au premier venu de faire le guet, comme ça ? Genre, ça s’trouve j’suis pas recommandable et tout. J’attends juste l’occasion de t’attaquer en traitre. » Je laisse passer quelques secondes absolument pas crédibles même pour quelqu’un ne me connaissant pas pour laisser finalement tomber, une moue joueuse reprenant place sur mes traits. « Bon, d’accord, même moi j’y crois pas. » Je m’écarte un peu de là où nous nous trouvions, juste quelques mètres plus loin, à un endroit où on a une bonne vue sur les nouveaux arrivants dans cette rue-là, me reposant contre le mur une nouvelle fois. « J’accepte, puis sérieux ça serait trop triste que tu puisse pas finir ça, ça manquerait au paysage. » Sans déconner. Et puis, j’ai toujours eu la fibre artistique – heureusement, quelque part, je songe en me souvenant que je me suis un peu inscrit en filière d’histoire de l’art pour l’an prochain et que, quand même, c'est pas pour rien non plus – alors je ne peux qu’encourager une artiste en herbe n’est-ce pas ? Le fait que ça soit pas très très légal n’est qu’un… Bonus alléchant. Je lui jette un petit coup d’œil amusé, retournant ensuite scruter les alentours avec sérieux « Tu fais souvent ça ? Taguer les murs, dans le coin ? Ou t’avais juste envie de redonner un peu de vie à ces vieux trucs qui puent la vieillesse a quinze bornes ? » Ça se trouve, j’aurais pu lui tomber dessus bien plus tôt, si j’étais sorti de mon antre. J’veux dire, j’la connais absolument pas, je sais pas son nom, son âge, sa race, rien du tout, mais l’association bouille d’ange pleine d’innocence à qui on donnerait le bon dieu sans confession avec une bombe de peinture à la main et le lieu du crime juste derrière elle c’est… Ça me donne envie de rire sans m’arrêter et de m’engouffrer là-dedans sans me poser de questions une seule seconde, sans me demander où je m’engage exactement. C’est peut-être complètement stupide, mais c’est le genre de situation que j’adore : Interdite, un peu dangereuse – coucou messieurs les policiers pas si loin que ça – et définitivement intéressante. Et clairement, ma vie manque de piquant en ce moment. La faute à qui ?  Bref.

Tout absorbée par le dessin que j'étais en train de faire et distraite par la musique que j'avais dans les oreilles, je ne l'avais pas entendu arriver. Heureusement pour moi, ce n'était qu'un jeune homme, enfin ça aurait pu être un flic et j'aurai été dans de beaux draps. Surtout que... Bah ce que j'étais en train de faire n'était pas légal, enfin ça l'était à partir du moment où on ne se faisait pas choper. Et je partais du principe que je n'avais aucunement l'envie d'appeler mon père d'un des bureaux de la police. Là, il me tuerait. Aussi simple que ça.  Je me retourne vers lui et le vois sourire d'une façon bien trop malicieuse pour qu'il aille prévenir qui que ce soit que j'étais là. Du moins, je l'espérais. Il semblait content de la peur qu'il m'avait foutu. Amusant, vraiment. Je le détaillais durant quelques secondes, mais j'avais trop l'odeur de peinture dans les narines pour sentir autre chose. Tant pis. Je détachais mon regard pour le poser sur le mur et reculais de quelques pas, histoire d'avoir une vue d'ensemble. Une moue se dessina sur mes lèvres, pas vraiment convaincue de ce que je faisais. Peut-être qu'une fois fini... Oui, peut-être. En tout cas, c'était loin d'égaler le pikachu que j'avais taggué sur un mur un peu plus loin. D'ailleurs, il y était toujours, ce qui était surprenant, c'est comme si on avait jugé qu'il était tellement bien fait, qu'on pouvait le laisser là encore un peu. Ce qui flattait mon ego, naturellement. Puis, sans trop savoir pourquoi je décidais de lui demander de faire le guet, le temps que je puisse finir mon œuvre. Je sentais que je pouvais avoir un minimum confiance en lui, assez en tout cas pour qu'il me prévienne si les flics venaient de ce côté. Dans le cas contraire, je courrais assez vite. Cette remarque me fit sourire. Je suis endurante et assez rapide pour une jeune louve, bon pas autant que mes ainés, mais rapide quand même. Partir d'ici en quelques secondes n'était pas un problème. Au pire des cas, je sais parfaitement jouer l'innocente. Mon attention se repose sur lui et un sourire amusé se dessine sur mes lèvres à ses dires... Je le regarde de haut en bas et secoue la tête avant d'éclater de rire. " Toi, peu recommandable ? Pardon, mais tu as surtout l'air d'un bébé chat en vérité !" Je continue à rire quelques secondes avant de me calmer. " Je suis peut-être une fille, mais je sais comment te faire mal, si jamais tu m'attaque en traître. Mais, tu ne le feras pas, ça n'a pas l'air d'être ton genre..." Un drôle de sourire se dessina sur mes lèvres. Sérieuse ? Possible. J'étais effectivement capable de lui faire mal si besoin est, mais je préfère ne pas le faire. Je n'aime pas blesser les gens. Finalement, il reconnaît lui-même qu'il n'y croit pas et je réponds à son sourire. Il se déplace légèrement pour avoir une vue d'ensemble sur ce qui se passe dans la rue d'à côté. Moi, je range mes écouteurs et me retourne vers mon dessin. Rien de grandiose, juste une licorne, je n'avais pas les couleurs pour faire un arc-en-ciel, tant pis. Finissons la licorne.J'eus un sourire quand il ajouta que ça serait dommage que je ne finisse pas. " Je pourrais pas réellement le finir, je n'ai pas les couleurs qu'il faut. Une licorne sans arc-en-ciel... C'est pas pareil." Oui, je tag une licorne et alors ? Cela change un peu des graphitis que l'on voit un peu partout. Je fronce légèrement les sourcils et m'y remets, je n'ai besoin que de cinq ou six minutes pour terminer cette partie. Pour le reste, on verra dans quelques jours. Mes sens en alertes, je m'empare d'une autre bombe et me remets à la tâche. C'est là qu'une nouvelle question me parvint. Je mis quelques secondes avant de lui répondre. " Pas vraiment, je le fais de temps en temps quand je n'ai rien d'autres à faire." Stricte vérité, et puis entre nous, il vaut mieux que je tag un mur plutôt que je mette le feu quelque part, non ? Je sentais son regard posé sur moi par intermittence, ce qui ne me dérangeait pas plus que ça. " Après, ça redonne un peu de vie dans le quartier. J'trouve juste dommage qu'on est pas le droit de le faire." Bon, je ne parle pas pour moi, ni pour cette licorne ni pour mon pikachu, je parle des autres, ceux qui se contentent de griffonner des trucs et qui font ça à l'arrache. Il y en a d'autres qui font de superbes choses et je les admire pour ça. Je recule de deux pas et regarde d'un œil critique avant de mettre un dernier coup de bombe pour finir cette fois-ci. " Terminé !" Finalement même sans arc-en-ciel, c'est sympa. Je commence à ranger les bombes dans mon sac et relève la tête vers le jeune homme avec un sourire. " Il sont toujours là ? J'ai fini, tu peux y allez si tu veux, je ne te retiens pas. Merci pour ton aide !" Je ferme le sac et m'approche de lui avec un sourire. " Au fait, moi c'est Jules-Angelo, mais tu peux..." La porte derrière nous s'ouvrit et le gérant de l'établissement en sortit. Il resta scotché sur mon œuvre et avant même qu'il est eu le temps de dire quoi que ce soit, je tirais mon nouvel acolyte sans nom par la manche. " J'espère que tu cours vite !" Et je partis la première avec un sourire amusé sur les lèvres.

Codage par Magma.

A la base je suis parti de chez nous juste pour découvrir le quartier, juste histoire de savoir un peu dans quoi je mettais les pattes. J’avais absolument pas prévu de…  Tomber sur une excitée de la bombe de peinture, absolument pas impressionnée pour deux sous par ma magnifique prestance – okay, j’abuse un peu, ça va, ça va – et qui m’engage direct dans ses combines en tant que guetteur. Sa spontanéité qui me rappelle fortement la mienne me donne envie de rire mais je me retiens du mieux que je peux pour vaguement tenter de me rendre impressionnant.
C’est un échec, bien entendu, mais j’me devais d’essayer au moins !

Je plisse un peu les yeux face à son regard scrutateur et, quand elle se met à rire, je ne peux empêcher une moue boudeuse de s’inscrire sur mes traits – ce qui, bien entendu, me rend encore plus crédible. Bien sur. Ou pas. « Toi, peu recommandable ? Pardon, mais tu as surtout l'air d'un bébé chat en vérité ! » Sous l’insulte, je claque la langue, outré. Un bébé chat ? Sérieusement ? Un bébé chiot, encore, ça pourraiiiit passer. Ça se transforme en noble chien et tout et tout. Mais un chat ? Ha non, ça, non, pitié. " Je suis peut-être une fille, mais je sais comment te faire mal, si jamais tu m'attaque en traître. Mais, tu ne le feras pas, ça n'a pas l'air d'être ton genre..." Toujours un peu boudeur, je ricane simplement en la toisant à mon tour, un sourire jouant sur mes lèvres sans que je ne me sente impressionné pour deux sous. Pour autant, j’ignore pas son avertissement je sais parfaitement qu’on est dans une grande ville où les créatures se fondent parfaitement parmi les humains. Et que malgré toute … L’innocence qu’elle dégage, elle pourrait parfaitement être… Disons… Autre chose. Après tout mon odorat ne m’est pour le moment d’aucune utilité. « Il faut se méfier du chaton qui dort, tu sais. » J’ironise, arrangeant l’expression à ma sauce pour coller à son … Jugement sur ma personne. Je n’en dis pas plus – que ça soit sur ses capacités à elle ou sur me tendance, ou non, à attaquer en traitre – et finit par admettre de moi-même que je suis loin d’avoir l’allure de quelqu’un de peu recommandable et accepte de faire le guet.
Du danger ? Ou ça ? … Bon d’accord, peut-être que j’attends ça avec beaucoup trop d’impatience, mais chut, soyons attentif et jouons parfaitement notre rôle, tout de même.
Malgré que j’observe attentivement les alentours, mes oreilles jouant aussi leur rôle là-dedans puisqu’au moins je peux entendre venir quelqu’un de relativement loin, je continue de parler avec elle, ne pouvant pas m’empêcher d’en rajouter une couche sur le fameux dessin qui continue de prendre forme sous mes yeux. « Je pourrais pas réellement le finir, je n’ai pas les couleurs qu’il faut. Une licorne sans arc-en-ciel… C’est pas pareil. » Je ne peux pas m’empêcher de rire à cette déclaration, suivant durant quelques courtes secondes et avec attention les mouvements qu’elle effectuait pour achever la fameuse licorne. « Non, c’est sur et certain même. Il manquera un petit quelque chose. Mais c’pas grave, juste la licorne ça suffira aussi à égayer le paysage. » Ça change des couleurs ternes qui trainent dans les environs, franchement. Quoi ? Oui, je suis aigri, le passage compagne – ville n’est pas facile, zut à la fin. Sans pouvoir m’en empêcher et parce que j’ai sincèrement envie d’en savoir plus à son sujet, je continue de la questionner et heureusement ça n’a pas l’air de la déranger. « Pas vraiment, je le fais de temps en temps quand je n’ai rien d’autre à faire. »Je renifle d’amusement à cette réponse, lui jetant un coup d’œil reflétant bien cet état d’esprit. « Après, ça redonne un peu de vie dans le quartier. J’trouve juste dommage qu’on est pas le droit de le faire. » Je hoche la tête et émet un bruit d’approbation à ses mots, observant le dessin avec encore plus d’attention alors qu’elle s’éloigne d’un pas, semblant le jauger d’un regard plus que critique. « Terminé ! » j’émets un sifflement d’admiration sincère, détaillant la licorne à qui l’arc-en-ciel ne semble pas réellement manqué vu comment elle redresse joyeusement la tête, sur son mur de briques. « Jolie, très jolie. Clair qu’il faudrait autoriser ce genre de chose, ça égaye le paysage au moins. »

Je baisse les yeux vers elle alors qu’elle range ses affaires tout en me jetant un coup d’œil, un sourire aux lèvres, « Ils sont toujours là ? » La tête un peu penchée pour écouter les sons qui viennent des alentours je me contente d’opiner du chef pour confirmer « J’ai fini, tu peux y aller si tu veux, je ne te retiens pas. Merci pour ton aide ! » Je me redresse du mur sur lequel j’étais affalé quand elle s’approche de moi, toujours souriante. J’ai bien envie de lui proposer de faire un bout de chemin ensemble, ne serait-ce que le temps de revenir sur la rue principale, histoire de parler un peu… Quoi, c’est la première réelle rencontre que je fais après tout ! « Au fait, moi c’est Jules-Angelo, mais tu peux… » J’ai absolument pas le temps de savoir comme je peux l’appeler qu’une porte s’ouvre d’un seul coup, me faisant me raidir une brève seconde. Juste le temps que l’homme fixe, bouche bée, la licorne nouvellement arrivée sur son mur. Il n’a le temps de rien dire que la jeune taggueuse - Jules-Angelo, elle a dit – m’attrape par la manche, lâchant un « j’espère que tu cours vite ! » Avant de tout simplement détaler. Un rire m’échappe et je la suis directement, ne réfléchissant même pas à faire autrement, ne réfléchissant pas à la possibilité de dire au mec que, nop, j’y suis pour rien, je viens d’arriver moi, monsieur. Nan, je fuis simplement, poursuivit par les cris de colère du gérant qui commence à courir aussi.
Je suis juste derrière elle et nos pieds frappent le sol dans un rythme rapide, juste avant que je ne me force à accélérer pour revenir à son niveau, ma main attrapant sa propre manche pour la tirer dans une autre ruelle parallèle, sur la gauche, alors qu’elle allait prendre à droite. « Pas par là, c’est là que sont les flics ! » Je lâche, un rire toujours au fond de la voix alors qu’on s’enfonce un peu plus dans le dédales des ruelles de Rome. Je lui jette un coup d’œil amusé avant de rajouter, le souffle court à cause de mon envie trop présente de rire, « Au fait, moi c’est Kaled. Enchanté de te rencontrer ! » Et malgré la situation, je suis complètement sincère en disant ça. Le petit boost d’adrénaline est la meilleure chose qui me soit arrivé depuis que j’ai mis les pieds dans cette foutue ville.