J'enfile ma veste, alors que je parcours les rues silencieuse de la ville. Nombreuses sont les créatures qui arpentent les ruelles, mais hormis ces quelques espèces nocturnes, la ville est calme. Je reste sur mes gardes, alors que mes pas claquent sur les pavés. Je ne suis pas encore bien habituée à cette cohabitation, bien trop habituée à la simple compagnie des loups. Maîtriser mes pouvoirs devient urgent. Même si j'ai cette tendance à penser que les créatures obscures, humains et néphilims ne sont pas mauvais de natures, l'idée que la majorité de la ville sois capable de m'écraser, sans que je ne sois capable de riposter, a quelque chose d'effrayant. J'accélère le pas instinctivement, en voyant le Forum romain apparaître sous mes yeux, éclairé de nombreuses lumières jaunes, qui viennent rendre les monuments plus impressionnants encore qu'ils ne le sont déjà de jour. Je contourne l'entrée donnant sur la rue principale, pour prendre une petite ruelle menant non loin du Colisée. J'évite soigneusement le monument, avant de me glisser jusqu'à l'arrière du Forum romain, pour prendre l'entrée de derrière, qui me mène au pied du mont palatin. J'enjambe discrètement et rapidement la barrière, espérant que le monde obscur ai rendu les autorités moins vigilantes au sujet du tourisme, avant de m'avancer d'un pas rapide vers le mont palatin. Je monte une à une les marches d'un pas de courses, avant de ralentir au premier palier, le regard rivé sur la vue imprenable sur les vestiges du forum romain. Personne aux alentours, je retrouve le calme auquel j'ai été habituée depuis l'enfance, ce calme réconfortant, rassurant, loin de ce mélange de population qui m'angoisse parfois plus que je ne le voudrai. J'aimerais pourtant être plus ouverte, plus à l'aise dans ce mélange, qui, dans l'idée, me plaît énormément. Seulement, j'ignore tout de ces créatures, j'ignore tout même des sorciers, en étant l'une des leurs.

Un soupire effleure mes lèvres, alors que je m'approche d'une petite place, offrant une vue incroyable sur la ville de Rome. Cette ville que j'aime déjà et que je hais à la fois de tout mon être. Elle m'a ouvert les portes de ce monde obscure dont j'ignorais tout et dont j'appartiens pourtant, mais elle m'a aussi arrachée ma mère. Assassinée. J'imagine que ma méfiance est en grande partie nourrie par ce souvenir. Je m'assois en tailleur sur l'un des bancs. Et me voilà ici, ce soir, isolée, pour retrouver un néphilims. Cette race que Kaled juge responsables. Pour sa mort, mais aussi pour celle de celui que j'ai toujours considéré comme mon père. J'ignore ce que je crois, j'ignore si j'exclue totalement cette hypothèse. Seulement, aujourd'hui j'ai décidé de laisser ces questions sans réponses de côtés. Après tout, je n'ai pas décidé de dissuader Kaled de poursuivre sa recherche de la vérité pour rien. Je refuse de laisser la haine me ronger. Encore plus lorsque je donne rendez-vous à un néphilims sur ce mont, au milieu de la nuit. Il ne m'a pas attaqué, il n'a pas été réticent à évoquer ses connaissances avec moi, pourquoi devrais-je m'en méfier ? Je me bouffe la lèvre, nerveuse, à l'idée de faire quelque chose que je ne devrais pas. Après tout, ils nous ont chassés par le passé, non ? Et aujourd'hui, s'ils se cachent ce n'est pas pour rien. Mais est-ce que je dois alimenter cette tension entre les néphilims et les créatures obscures ? Je le devrais probablement, si je suivais une certaine logique, mais je n'ai pas grandi dans cette idée-là. 

Un bruit me sort doucement de mes pensées. J'esquisse un sourire, avant de me retourner, pour voir apparaître un visage familier. Assise, je pivote sur moi-même, pour lui faire face, avant de lui adresser un petit signe de la main. «  Salut toi. » Quelle idée de venir jusqu'ici au milieu de la nuit pour venir retrouver un type. Certes, il a quelque chose d'attachant, et il a le don d'attiser toujours un peu plus ma curiosité et de répondre à la fois à cette soif d'apprendre que j'ai toujours eu. «  Je pense que le coin devrait être assez isolé pour qu'on soit tranquille. » Je jette un œil au ciel, avant de reporter mon regard sur Ghislain, laissant échapper un léger rire amusé. «  Je sais qu'on nous appelle créatures obscures, mais je doute qu'on en croise beaucoup à cette heure-ci aussi. » Mais je comprends la méfiance et les précautions. Et n'ayant pas la moindre envie d'être interrompue et entraînée dans un combat qui n'est pas le mien, ou une course-poursuite où je ne ferais pas le poids, ces précautions m'arrangent plus qu'autre chose. Je prends une voix amusée, avant d’enchaîner, un sourire aux lèvres. «  Je t'assure qu'une sorcière ça dort à cette heure-ci. En temps normal » Comme s'il l'ignorait …

I have loved the stars too fondly to be fearful of the night- Neiza ✻✻✻  Croupir. Ternir. L'entièreté de ces roches, de ces terres massives .. qui le surplombait, qui l'ensevelissait malgré lui dans des tréfonds tortueux l'acheminait péniblement vers un ennui sec. Âpre existence qu'était là sienne, naquit puis octroyé en sacrifice sur l'autel de la destinée et d'hors-et-déjà un pieds dans la tombe.  Il y avait de ces nuitées où l'isolement souterrain lui apparaissait tel un odieux exil. Une méprise au grès du flot incessant  de son existence qui filait sans ne plus l'attendre. Ses songes tortueux pouvaient bien demeurer agrippés à un antan fané, il pouvait bien s'échiner à singer avec fadaise un scénario déjà gravé dans le marbre du destin..Nul ne lui tendrait une paume offerte. Pour s'en saisir. Pour y déposer un regard épris de surprise oscillant entre espoir crédule et défiance volubile. Qui étaient ceux qui avait de l'égard pour les bêtes rouées de coup gisant sur les bords d'autoroutes ? Pendant longtemps, ce qui lui semblait être une éternité, Ghislain Verlac n'avait guère su apporter de réponse à cette creuse interrogation. Des bonnes âmes persistaient, probablement, elles vivotaient au grès de ces aléas terrestres. Elles foulaient des milliers d'étendue tout en crevant de solitude. Fatalement, qui osait se laisser sauver sans ne jamais dispenser des coups de crocs ? Sans oncques danser de la mâchoire ?  L'ego ventripotent et odieux crachant à la face des altruistes ... Et bien, lui. Lui. il aspirait à reluire, à serrer les paumes, dispenser des ris. Utopiste ? Naturellement. Pacifique ? Profondément. Quant au voyeur épiant ses plaies béantes ? Une obscure. Ce songe lui tordait les lèvres en un rictus pétris d'espièglerie. Comme la vie était mutine, comme la destinée était cruelle, comme le temps se dérobait. Arraché sa famille, brisée sa fratrie, annihilée sa parabataÏ, mais dément prêchant la paix ... il pactisait avec une sorcière ? Un reniflement amusé s'élevait à l'instant où ses prunelles céruléennes glissaient au grès de l'astre blafard qui tamisait la surface. Un miséreux flambeau qui lui était octroyé-là, mais il lui semblait déjà si lumineux que le français se surprenait à plisser les yeux une fraction de seconde. Comble de l'absurde, mais comme tout être incarné dans la matière il se gâtait d'automatisme arbitraire. Schéma redondant brillant d'une spontanéité navrante. Une brise fraîche balayait sa bistre chevelure, le Colisée brisant l'horizon. Le forum n'était pas si lointain et si peu fréquenté en ces heures reculées que l'amas de tension qui l'escortait au cours de ses escapades s'amenuisaient avec délice. Il y avait un voile de légèreté dans cette nuitée, un vague présage de paix qui lui complaisait. Pour autant, Ghislain n'était guère candide, naïf, futile... Certes, l'on pouvait lui allouer ces traits disgracieux teintant comme un grossier reproche, mais là demeurait la fausseté .. dans l'aisance précisément. Ombre parmi tant d'autres, il progressait à l'abri des regards, il suffisait de reluire de spontanéité. Rougir sous l'affront ? Ridicule, ça ne sauvait guère que les couard de s'égarer dans leur fantasmagorique effroi. Ghislain ne goûtait guère de ce pain rassis. Autant parfaire son méfait et n'en point pâlir. Un peu de tact, un peu d'audace ! Neiza n'en n'était pas dépourvu et il devait admettre que cela lui complaisait. Les pleutres étaient encombrant et crevait dans la balourdise, là où les traits d'esprit sauvaient ! Il lui semblait que la créature obscure en était doté, du moins cela était les suppositions qu'il nourrissait depuis que leurs destinées s'étaient heurtées. La curiosité en étendard la banneret Fantinato lui plaisait. Un rictus léger pour étendre ses lèvres jusque-là close, le français s'affranchissait des pierres. Rien ne valait la ville de Lumière, le pavé avait cet éclat que la roche romaine grossière et familière n'avait définitivement pas. Il ne lui en fallait pas plus pour rejoindre cette silhouette. Ephémère instant, sa posture se fige. Ses prunelles s'entichent de la vue. Splendide nuitée. La jeune femme était là, sous les étoiles, sous les empyrées, admirative de la Lune ? Non,cela devait si fade pour son regard privilégié. Quelques enjambés suffisent à la rejoindre semant des bruissement la faisant pivoter. "Salut toi. " Obscure souriante, lumière enchantée. "Vous ici ?" feignait le Nephilim avant de laisser échapper un reniflement amusé. L'érudit appréciait ces instants volés à la tension, il y distillait un peu de bienveillance dès qu'il le pouvait. " Je pense que le coin devrait être assez isolé pour qu'on soit tranquille. " Saignée d'enthousiasme, souviens toi. Ses prunelles vrillent sur la vacuité avec une factice flegme. Ghislain Verlac semblait désintéressé de l'effroi, à mille lieu de la politique. Cela était si factice, mais la témérité était de ses pêchés. Il haïssait les fuyants, d'une certaine manière. Il haussait les épaules désinvolte. L'amusement ricochant jusqu'à son ouïe lui fait esquisser un rictus léger agissant comme un reflet, un miroir loyal. " Je sais qu'on nous appelle créatures obscures, mais je doute qu'on en croise beaucoup à cette heure-ci aussi." Une moue faussement boudeuse s'emparait de ses traits "Figures toi que j'en serai presque déçu" Quel humour ! Quel Nephilim.. Son échine oblongue se courbait, ses genoux se repliait prenant place aux côtés de la jeune femme tout en faisant basculer son sac à dos. L'homme était venu paré, l'éducation était affaire de famille. L'excellence tout autant. Les Verlac brillent vers l'extérieur, éblouisse, ternisse les moindres adversaires. " Je t'assure qu'une sorcière ça dort à cette heure-ci. En temps normal" Relativement bon public, un ris lui échappe. Léger s'étiolant avec la brise. "Je te crois sur parole" soufflait le Nephilim d'un timbre plus sérieux. Un zip brisant la placidité du forum et cette quiétude reposante il sortait un ouvrage pas plus gros que sa paume. Les runes douceâtre plaisir. "T'es en forme j'espère !" entre son index et son pouce fermement clos sur ce vieux cuir usé, le livre valsait en un mouvement frénétique de droite à gauche, de gauche à droite. "Attrapes" Vivement l'ouvrage déployait ses pages sur sa comparse. "Fais attention, c'est un bouquin ancestral" Son crâne dodelinait agitant souplement ses mèches brunes. "T'as déjà entendu parlé des runes ?" Il écartait son sac en un geste dédaigneux, plus rien n'y résidait...il était évidé de tout savoir ..autant dire que ce n'était plus rien à son regard. Seule l'intelligence vive et les cervelles frétillantes le fascinait. "Oh d'ailleurs tu vas bien ?" soufflait-il soudainement distrait par la lune qui l'avait aspiré au détour d'un regard.

Mon regard glisse sur le sac à dos qu'il fait basculer. J'esquisse un sourire. Je suis, certes, toujours impatiente d'en savoir plus, sur ce monde que je n'ai jamais réellement fréquenté, mais il semble bien plus impatient que moi, puisqu'il en sort déjà l'objet d'apprentissage. Je suis née sorcière, je fais partie de ce monde des créatures obscures et je devrai donc bien connaître les nephilims. Seulement, je ne connais que peu de choses sur le monde obscure et les nephilims. Mes connaissances s’arrêtent au loup-garou qui m'ont toujours entourés. « T'es en forme j'espère ! » Je hoche la tête avec un certain enthousiasme. Il est peut-être tard, mais mes nuits éveillée à attendre sagement et impatiemment le retour de Kaled et mes parents, m'ont apprit à veiller tard. Je regarde le bouquin passer d'une main à l'autre, avant qu'il ne me jette un « Attrapes » accompagné du bouquin, que je rattrape maladroitement entre mes doigts. « Fais attention, c'est un bouquin ancestral » Mon regard se lève vers lui, alors que je laisse échapper un rire amusé. « Dit-il après me l'avoir jeter. Attention mon cher, je ne suis pas aussi adroite que les néphilims » Peut-être un jour. Peut-être lorsque j'aurai apprit à maîtriser mes pouvoirs comme il se doit. Je rêve souvent de ce que je serai capable avec de l’entraînement, mais aujourd'hui mon usage ne reste que minime, si bien que je pourrai facilement me fondre dans la masse humaine sans ces écailles qui ornent mon bras et mon épaule. « T'as déjà entendu parlé des runes ? » Je me mords légèrement la lèvre, réfléchissant à ce que je sais de ces runes. Mes connaissances restent limités encore une fois. A-t-il conscience du niveau de mon ignorance ? Ça a quelque chose d'angoissant, d'intimidant, d'être l'une des rares personnes de cette ville peu informer.

J'ouvre les lèvres pour répondre, lorsque sa voix brise à nouveau le silence. « Oh d'ailleurs tu vas bien ? » Voilà une question à laquelle je peux répondre sans la moindre hésitation, ou peur de passer pour une ignorante. « Ca va, je me fais doucement à la vie à Rome. J'avoue que c'est juste parfois un peu effrayant de se sentir impuissant face aux créatures qui peuple les rues. » Entre les créatures bien plus puissantes, certains néphilims qui nourrissent un besoin de vengeance contre les créatures obscures, ces humains effrayé qui veulent reprendre leur monde par la violence, j'avoue que cette nouvelle vie a quelque chose d'angoissant. L'urgence d'apprendre à maîtriser mes pouvoirs se fait de plus en plus présente. « Mais j'imagine que ça n'est pas grand-chose par rapport à ta situation. Et toi tu vas bien ? » Ça a quelque chose d'inquiétant de savoir que quelqu'un que l'on apprécie est en danger. Même si ça ne fait pas bien longtemps que je le connais, même si je sais que je ne devrais probablement pas traîner à ses côtés. Généralement, je ne suis pas jugée assez puissante pour être dangereuse et trop nouvelle pour être accusée de soutenir la rébellion, si bien que l'on me laisse vivre ma vie sans trop d'emmerdes. Distraite, alors que je prononce ces mots, j'ouvre le livre entre mes mains, pour y glisser un œil curieux, sans pour autant perdre le fil de la conversation. J'ai toujours été piqué par cette curiosité, ce besoin d'en savoir plus sur le monde qui m'entoure. Mais jusqu'à récemment, isolée en Sicile, je ne me suis pas penchée concrètement sur le sujet, tout ça me paraissait lointain, presque comme un conte, des mythes. Plutôt paradoxal, puisque j'en fait partie.

Je relève les yeux vers Ghislain, après avoir laisser un léger soupire effleurer mes lèvres. « Je ne connais pas grand-chose sur les runes. Je connais pas grand-chose sur quoi que ce soit à vrai dire. » J’enchaîne après une courte pause, sur un ton plus amusé. « Mais interroge moi sur les loups et je pourrai te dire à peu près tout ce que tu voudras. » Étrange d'en savoir plus sur un race que sa propre race. Je fouille dans ma mémoire, à la recherche de ce que j'ai pu lire dans le passé au sujet des runes, sans réussir à en tirer beaucoup d'informations. Une lueur enthousiaste passe dans mon regard, alors que je reprends. « Je sais que c'est aussi une forme de magie, qu'elles vous procurent des capacités et pouvoirs surhumains. » Cette capacité à s'approprier divers pouvoirs par la maîtrise d'un alphabet aussi complexe soit-il a quelque chose de fascinant. Même pour une sorcière.

I have loved the stars too fondly to be fearful of the night- Neiza ✻✻✻  La réplique vive au coin de ce geste pétris d'espièglerie lui avait étiré le coin des lèvres avec délice. Le français appréciait les traits d'esprit, les frivoles verves, le répondant. Il privilégiait autant que cela lui était permis cette vivacité dans son cercle relationnel. D'ailleurs d'une certaine façon Morgan au-delà de ses travers abrupts et bourrus correspondait à une telle exigence. Rebondissement, virage trop sec, effréné démence qui grippait les esprits, qui poussait aisément les mots, agitait les corps. Ghislain Verlac considérait qu'être encerclé par l'essence même de la vie était un salut, un songe intangible de sa valeur mental. Demeurer larvé au grès d'émis révolus et se perdre dans ses non-dits n'était guère de ses passions ... conscientes tout du moins car un esprit retors et plus élitiste qu'il ne le soupçonne demeure dans sa matérialité. Chaque parcelle de derme recouvre cette réalité. Mais en substance il se joignait à l'affirmation de Neiza, elle n'était guère aussi habile qu'un Nephilim et pour cause ! Toute ses jeunes années avaient été vouées à cette singularité. A son ultime interrogation fort éloignée de ses considérations érudites la sorcière lui octroyait une réponse plus encline à l'échange .. ou simplement plus inspirée  "Ca va, je me fais doucement à la vie à Rome. J'avoue que c'est juste parfois un peu effrayant de se sentir impuissant face aux créatures qui peuple les rues." Le traqueur dodelinait faiblement du crâne occasionnant la valse de ses mèches de bronze. Elle se faisait doucement à cette existence romaine ? Voilà qui le contraignait à une abstraite forme d'admiration. Après ces fastidieuses années à vivoter au grès des veines terreuses de cette Rome haït le néphilim ne s'était toujours guère accoutumé à cette infamie. Rome lui inspirait le plus souvent une profonde révulsion ce qui confortait l'angelot dans ses futiles disgrâces et le maintenait dans cette ambivalence atypique. Il se mouvait au pieds du Colisée, foulait les étendues de la cité, mais en un sens il ne faisait qu'errer. Coincé, bloqué entre une réalité scindée et duale. Quant à l'effroi de la jeune femme, Ghislain n'allait guère faussement compatir. La crainte ? Une bien piètre compagne qui ne faisait que froisser les aptitudes naturelles propre à chacun. D'autres opteraient pour la transcendance de ces mêmes aptitudes ... Le chasseur n'y croyait guère. La peur lui semblait le plus souvent une frivolité dont il ne fallait guère s'encombrer. "J'imagine oui..." glissait-il de sa voix de basse-taille en esquissant un rictus oscillant entre une factice provocation, une ténue raillerie, une avérée espièglerie. "Mais dis toi qu'au moins tu n'es pas humaine" L'azur de son regard coulait vers le faciès de la sorcière non sans une pointe malicieuse. Que ses dires étaient manichéens, Morgan était à l'opposé de l'innocence chétive et empotée, mais s'amuser des dualités avait son charme. D'ailleurs, il ne doutait guère que son interlocutrice à l'esprit vif ne boute ses boutades. "Mais j'imagine que ça n'est pas grand-chose par rapport à ta situation. Et toi tu vas bien ?" Nul ne saurait dire si cela était un trait évident de déni, mais un reniflement amusé brisait son apparente indolence. A cela il ajoutait un haussement d'épaule presque nonchalant. Ghislain ne savait que penser de sa fameuse situation. Oh certes vivoter dans les entrailles de cette planète n'avait rien de reluisant, mais lui avait été dressé pour combattre. Malgré les tensions, malgré les pertes, les roustes, les balafres d'un destin opiniâtre le français ne parvenait pas à vibrer de crainte. En danger ? Sûrement, mais il lui semblait lointain et impalpable. Ainsi il lui était loisible de l'amoindrir, de le faire crever sous le poids de ses convictions. lui, une proie ? Jamais ! Sa fierté rongeait ses songes dès qu'on lui soulignait sa "situation". "Il y a pire" L'angelot lui servait un rictus. "Mais ça va !" Ses yeux se levaient sur la Lune et son aura apaisante. Une forte belle présence. Un véritable honneur. "Je ne connais pas grand-chose sur les runes. Je connais pas grand-chose sur quoi que ce soit à vrai dire" instinctivement sa tête se penchait sur le côté comme buvant ses paroles tout en étant accroché à ses lèvres. Cela lui semblait incroyable de baigner dans un état si pur. Les possibles étaient infinis, une toile vierge était l'incarnation des plus folles réalités à venir. "Mais interroge moi sur les loups et je pourrai te dire à peu près tout ce que tu voudras." Ses sourcils de bronze s'arquaient une fraction de seconde. Pas si pure. "Intéressant ces savoirs croisés" soufflait le français. La diversité faisait la sagesse, cela faisait la paix. C'était une conviction. "Je sais que c'est aussi une forme de magie, qu'elles vous procurent des capacités et pouvoirs surhumains." Acquiesçant les membres du français se mouvaient lentement comme soucieux et conscient de la fragilité de l'instant. "C'est exactement ça oui" Le néphilim se permettait quelques oeillades, son regard glissait sur la vacuité du forum. Ils étaient seuls. "Déjà, il faut savoir qu'elles sont éphémères pour la plupart" D'un geste quasi anodin l'angelot remontait le tissu de son jean puis baissé le tissu de sa chaussette dévoilent un tracé argenté caractéristique. "Cette rune n'est plus active, elle témoigne simplement de ce qu'elle fut jadis. D'où cet aspect caractéristique" Il passait un index vif sur la cicatrice. "Je t'apprendrai à les tracer, tu vas voir c'est vraiment..." Incroyable ? Cela le fascinait tout intimement, mais il savait que son attrait runique demeurait singulier. "Instructif" tranchait le jeune homme en laissant retomber le pan de tissu. "L'emplacement a aussi son importance" Instinctivement sa paume frôlait son palpitant noyé sous les chaires. "Plus une rune est proche du coeur, plus sa puissance est accrue" il en avait de nombreuses éparpillées sur son derme, cela lui octroyait des airs extrêmement atypiques pour les non-initiés, mais là résidait une part de sa fierté. Une moue intriguée lui venait promptement comme faisant volte-face soudainement. Son faciès vrillait vers la demoiselle qui l'escortait dans cette nuit d'encre. "Pourquoi les loups, d'ailleurs ?" Que pouvait-elle dissimuler sous cet étrange attrait.