Mon regard s’illumine l’espace de quelques secondes, l’espace de quelques instants alors que mes iris glissent sur l’inconnu. Il est plus jeune, terriblement jeune. Louveteau lancé dans le monde étrange qu’est le nôtre, inconnu dont l’odeur n’est qu’une immensité de potentielles. Doucement, mon corps se tourne. Une lenteur prédative, une lenteur dangereusement stressante. Je m’y tiens, comme une habitude féroce, comme un besoin imposant de montrer qu’ici, je ne suis pas la proie mais bien le prédateur. Je m’éternise avant de me retrouver face à lui, ce jeunot aux années pas encore tant écoulées que ça. J’hume l’air discrètement, quoi que, pas tant que ça. Mon instinct animal me pousse à agir, à le regarder droit dans les yeux comme pour m’imposer sans pour autant faire un pas en avant. Ma tête se penche légèrement sur le côté alors qu’il parle. Je ne le quitte pas des yeux, impossible, inconcevable. Il ne faisait pas attention, peut-être qu’il aurait dû. Peut-être que le monde est dangereux, peut-être qu’il n’est qu’un gosse lancé dans un océan de créatures dangereuses. Les pensées se bousculent sans jamais se concrétisée, bien trop de choses en tête pour m’arrêter à une chose complète. Mon regard glisse sur le côté, derrière lui, observant deux personnes non loin. Un homme, une femme, trop loin pour que je sente l’odeur qu’ils portent. Il parle de nouveau, ses paroles viennent résonner comme un murmure lointain, une mélodie étrangement harmonieuse sans pour autant être dorées. Mon attention se reporte sur lui et sa jeunesse illuminée par une lumière artificielle qui ne lui va certainement pas au teint. Sa question aurait pu me faire sourire si j’en étais capable, si mes lèvres n’étaient pas sans cesse scellées par un instinct dévastateur. « Question stupide. » Simple phrase, la voix rogue, presque un grognement alors que mes iris s’illuminent d’une lueur argentée, laissant apparaître cette nature lupine, presque comme une menace invisible. J’approche légèrement, j’hume de plus belle. Il a des odeurs artificielles sur lui, mais une reste ancrée, trop souvent en contact avec son corps. Une femme, une louve, sûrement sa compagne. « Tu es nouveau… » Etrangement, un sourire léger vient caresser mes lippes carnassières. Ça ne me ressemble pas, mais l’animal en moi se révolte autant qu’il pourrait en ronronner. « Mais plus pour très longtemps… » Sous-entendu, peut-être, peut-être pas, cette phrase à un sens pour moi, peut-être pas pour lui, mais qu’importe. « Bienvenue en ville. » Ma tête se penche de nouveau, mon regard reste en contact avec le sien, la limite entre nos corps c’est estompé, je bouffe son espace vital d’une façon intentionnelle. Beaucoup pourraient voir en cet acte un geste de menace, un geste dangereux. Pas cette fois.

@Kaled J. Fantinato

AVENGEDINCHAINS

costume de Zacc:

@Diane Herondale la serra dans ses bras, et Georgie lui rendit son étreinte avec plaisir. La jeune femme, bien que plus âgée qu’elle de quelques années, était une des rares personnes avec qui ses épaules et son ventre se détendaient : elle savait qu’elle pouvait se laisser aller et être elle-même. Et si elle devait une partie de ce sentiment à la nature même de Diane, qui avait fait qu’elles étaient devenues si proches amies, elle le devait également au fait que celle-ci l’avait vu au plus bas, quand la perte de ses parents venait à peine de la frapper. Elle était restée – persévérante ou butée, même si Georgie se plaisait à vanter la persévérance plutôt que la seconde option – près d’elle alors qu’elle aurait pu abandonner la jeune femme et sa cause. Elle ne lui en aurait même pas voulu : elle se savait telle une ancre qui draguait les fonds marins, lourde, lente, obstinée. Et il était impossible pour une seule femme de tirer cette ancre hors de l’eau, de lui faire retrouver l’air frais et pur. Pourtant, elle avait tiré, tiré, tiré, probablement jusqu’à l’épuisement, et tout doucement, Georgie avait retrouvé la vue et la vie. Elle n’était pas tout à fait sortie d’affaire ; mais elle avait la conviction qu’elle ne le serait jamais. Le deuil, selon elle, n’était qu’un mythe : on n’oubliait jamais, on apprenait seulement à vivre avec la douleur, à la considérer comme une vieille amie plutôt qu’une étrangère.

« Je ne le savais pas moi-même jusqu’à il y a environ une heure ! » Elle rit. «  Je suis ravie que tu sois là, c’est une vraie bonne surprise. » Au compliment de son amie, elle fit un petit tour sur elle-même, s’improvisant mannequin, avant de faire la moue. «  Je te renvoie plus que volontiers le compliment. T’es-tu seulement vue dans un miroir ?! Tu es à couper le souffle. »

Même si elles étaient unies par des liens fraternels et non par des liens amoureux, Georgie ne mentait pas : elle avait en effet le souffle coupé dès que ses yeux se posaient sur son amie. Elle avait même eu un faible pour elle, les premiers mois ; cependant, elle se savait indisponible émotionnellement à cette époque, et depuis, le penchant qu’elle avait eu pour Diane s’était estompé pour des sentiments purement platoniques.

« Et pourtant, malgré ma beauté et mon intelligence, etc, etc … » Elle resta de marbre, fidèle à son humour pinçant. « Je suis belle et bien seule. Ou je n’ai pas encore eu le plaisir de tomber sur l’un de mes collègues, qui sait, la soirée est sûrement pleine de surprises. Mais maintenant que je t’ai trouvée, je m’en passerai bien. » Elle lui adressa un léger clin d’œil. « Et toi alors ? Tu es seule, toi aussi ! Qu’est-ce qui t’amène ici ? Tu attends quelqu’un ? » La question, innocente, resta en suspens quelques secondes, puis Georgie écarquilla les yeux. « NE ME DIS PAS QUE TU ATTENDS QUELQU’UN, je serais offusquée de ne l’apprendre que maintenant ! »

Elle n’était d’ordinaire pas de celles à se prendre au jeu des potins ou autres, mais elle était d’humeur légère et Diane avait toujours eu cet effet sur elle : retrouver ses vingt quatre ans et la frivolité qui allait d’ordinaire avec le début de la vingtaine.

Je porte à nouveau le verre à ma bouche, mais alors que le liquide lèche mes lèvres, je me fige. Kaled répond au sorcier, toujours avec cette même insolence. Sa première phrase me fait écarquiller les yeux. Décidément, mon frère ne tient pas à la vie. J'abaisse mon verre sans en boire une gorgée, pour ne pas risquer de m'étouffer. Quelques siècles de plus que moi il a dit, ça lui suffit pas à mesurer ses mots ? Même moi, sorcière, il impressionne. Et lui, lâche le plus simplement du monde des provocations à la pelle. Ses propos m'arracheraient probablement un rire en temps normal, seulement, j'ai un minimum d'instinct de survie. Je le regard s'éloigner sur une dernière provocation, qui me fait légèrement sourire, malgré moi. Ce n'est pas moi qui le priverais de champagne ce soir. « Est-ce que votre frère vient de se rendre compte qu’avec sa définition des « espèces qui ont une apparence jeune mais ne peuvent pas s'empêcher d'agir et de parler comme des vieux. », il vient d’englober à la fois les vampires et les sorciers les plus anciens dans la liste de ses potentiels ennemis. Ne serait-il pas complètement inconscient ?  » Je reportant mon regard sur le sorcier, en hochant lentement la tête en guise de réponse, esquissant une légère grimace qui en dit long sur ce que j'en pense. Et on se demande pourquoi je passe mon temps à m'inquiéter pour lui. « On a jamais vécu mélangés aux autres créatures. Seulement des loups et quelques humains du villages. Il n'est pas vraiment habitué à ce genre de question. » Et son insolence le tuera un jour. Sans aucun doute. Alors qu'il me tend le bras, je le suis, sans trop m'arrêter sur mon frère, qui semble déjà avoir trouvé une nouvelle occupation. Il survivre bien sans moi une soirée, non ? « Mais puisque votre cavalier semble vous avoir fait faux bond, je me propose pour vous accompagner jusqu’à ce que vous jugiez ma compagnie inintéressante.  » Inintéressante, comment ? J'ai toujours voulu rencontrer des sorciers, en apprendre plus sur mes pouvoirs, sur ce que tout ça implique. Et ce soir, je me retrouve face à un sorcier de plusieurs siècles. Certes, je n'ai pas envie de l'assommer de question, alors que je ne le connais même pas. Mais sa présence à quelque chose de terriblement intriguant. « Je risque de ne pas vous lâcher si vite dans ce cas. » Mon ton est teinté d'un certain amusement, alors que mes lèvres dessinent un nouveau sourire. 

Je termine ma coupe de champagne, avant de la déposer à mon tour sur un plateau, plus à l'aise les mains libres. Alors qu'il me fait signe, je m'avance pour m'éloigner de la foule, pour un coin plus retiré. « Vous excuserez ma curiosité mais j’ai rarement entendu parler d’une fratrie composée d’un loup-garou et d’une sorcière. Avez-vous les mêmes parents ? » Je fronce légèrement les sourcils, ancrant mon regard dans le siens, stoppant mes pas. Je réfléchis un instant, mordillant nerveusement ma lèvre. Nos parents, sujet sensible. Je prends un instant avant de répondre, pas certaine de vouloir évoquer le sujet. Mais après tout, n'ai-je pas dit que je devais m'ouvrir un peu plus aux autres ici si je voulais rencontrer du monde ? « C'est plus compliqué que ça en réalité. J'ignore si ma mère est morte ou si elle m'a simplement abandonnée, mais un couple de loup m'a recueillis peu de temps après ma naissance. Six ans plus tard, ils ont eu Kaled. » Nous n'avons pas le même sang, j'ignore même si cela est possible, mais il ne me viendrait pas à l'idée de remettre en question nos liens de famille. Il est tout ce qu'il me reste et je suis tout ce qui lui reste. « J'ai grandi parmi les loups et hormis les loups, je suis la seule créature obscure que Kaled ai connu. Ça explique peut-être son inconscience et probablement mon incapacité à vous reconnaître. Puisque cela semble si facile pour vous. » Avouer à demi-mot que je n'ai presque pas de contrôle sur mes pouvoirs n'est peut-être pas la meilleure idée que j'ai eu. « Maintenant que vous en savez certainement trop sur ma famille, je pourrais au moins connaître votre nom ? Vous nous avez demandé de nous présenter, sans le faire vous-même. » Ce n'est pas tellement un reproche, plus une réelle envie de savoir qui est ce sorcier.